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Critique de Fleitour


Que c'est bon, de temps en temps de lire un livre d'un romantisme endiablé, surtout quand le diable souffle sur les braises de l'amour. Dans cette Peau de Chagrin, parmi les premiers livres De Balzac il y a tout le romantisme avouable, porté jusqu'à sa démesure.

Dès le premières pages et "au premier coup d'oeil les joueurs lurent sur le visage du novice quelque horrible mystère : ses jeunes traits étaient empreints d'une grâce nébuleuse, son regard attestait des efforts trahis, mille espérances trompées ! La morne impassibilité du suicide donnait à son front une pâleur mate et maladive."

Comme Lamartine, le jeune Raphaël de Valentin aurait pu ajouter "je meurs et ne sais pas ce que c'est que de naître ( cf, Jocelyn)".

Malgré notre lecture éclairée des Fragments d'un Discours Amoureux, le jeune et désargenté Raphaël nous émeut, nous entraîne dans ses tourments, et avec lui on fera tout pour séduire la trop belle Féodora, on se prend au jeu, on pleure, comme Raphaël très très fort pour implorer et fondre en larmes pendant des heures, subissant la torture d'une femme qui jubile de le voir supplier ; ne me quitte pas.

Honoré de Balzac semble jouer et même surjouer avec les sentiments de Raphaël, avec tous les dérèglements amoureux, tous les comportements insensés, tous les espoirs fous et tous les chagrins puérils ou insondables.
Toutes les aventures passionnelles, toutes les mélancolies, toutes les âmes tourmentées, défilent et Raphaël ne voit pas l'amour, le vrai, le discret, celui immense mais tu, de Pauline, sa jeune voisine.

Le jeune Raphaël de Valentin ne va t-il pas avouer, "ma fatale imagination me dessina mille projets sans base et me dicta des résolutions impossibles". C'est Feodora qui le plonge au désespoir et l'incite à accumuler dettes et folies.

C'est surtout le pacte qu'il a passé avec le diable, qui l'entraîne vers la folie, ce pacte qui est au coeur du livre, qui va donner du sens à ce roman fantastique qui se pare d'une visée bien philosophique.

C'est sur le sens de sa vie que Balzac s'interroge."Ah! la gloire, triste denrée. Elle se paye cher et ne se garde pas. Ne serait-elle point l'égoïsme des grands hommes,comme le bonheur est celui des sots?"

"Si tu me possèdes, tu posséderas tout, mais ta vie m'appartiendra". le vieillard met en garde le jeune homme : chaque désir exaucé fera diminuer la taille de cette peau, symbole de sa vie : "Le cercle de vos jours, figuré par cette Peau, se resserrera suivant la force et le nombre de vos souhaits, depuis le plus léger jusqu'au plus exorbitant". le jeune homme accepte ce pacte diabolique.

Prenant conscience de l'inexorable rétrécissement de la peau, et du temps qui lui est compté, Raphaël vivra en reclus. Sa survie devenant sa seule préoccupation, il constate que, bien que doté de l'amour et du pouvoir , il n'en fait rien et il meurt rongé d'amertume, foudroyé par un dernier désir, celui de vivre encore.

"L'âme humaine est une fée, elle métamorphose une paille en diamants; sous sa baguette les palais enchantés éclosent comme les fleurs des champs sous les chaudes inspirations du soleil."
Les passions humaines sont trompeuses, c'est le messageDe Balzac, lui qui dans ses romans, court après l'argent, lui si romantique avec les femmes, et pour qui la grande Comédie Humaine est en marche, Balzac adresse ce message à lui même.

"la voici la reine des illusions, la femme qui passe comme un baiser, la femme vive comme un éclair, comme lui jaillie brûlante du ciel." Raphaël va trouver l'amour mais il va perdre la vie.

A l'heure des SMS, la quête de cet amour impossible, prête à sourire, l'écriture si enivrante De Balzac finira par nous faire croire à un dernier coup de théâtre.
Il arrive pourtant ce baiser avec Pauline, mais comble de malheur pour combien de jours.
Oui je l'avoue il m'a mené en bateau, ce Balzac, mais j'ai adoré ce livre et cette fin si acide envers ces médecins aussi stupides que suffisants, aussi incompétents qu'orgueilleux, un beau moment de littérature.


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