En découvrant l'homosexualité de mes enfants, j'avais trop pris sur moi. Je m'étais mis dans la tête que ce n'était pas grave, que j'étais une mère modèle et surtout capable d'accepter ce genre de chose. Mais il fallait être réaliste : quelle mère sauterait au plafond et s'écrierait "Génial ! j'ai des fils pédés !" en apprenant la nouvelle.
Bon Damien, va t'occuper des invités avec Adrien. Il faut qu'on discute avec maman.
- Tu déconnes là ? Je veux rater ça pour rien au monde, a repris mon cadet.
- Mais qu'est-ce que tu fous là, Benjamin, bordel ? T'es malade ou quoi ?
Mais...... Mais, Maxime c'est chez toi ?
Il était temps que je reprenne le contrôle de la situation et que j'intervienne :
- Bonsoir Benjamin, me suis-je exclamée en en faisant des tonnes. Comme je suis contente de te voir.
- Pourquoi souris-tu de la sorte ? C'est grotesque....
Incapable de se retenir plus longtemps, il a éclaté de rire avant de me demander fièrement :
- Tu n'as rien remarqué ?
- Non. Quoi ?
- La secrétaire médicale.....
- Quoi, la secrétaire médicale ? Elle est un peu vulgaire c'est tout.
- Oh, non ma chérie. Elle n'est pas un peu vulgaire. Il est complètement vulgaire. Ta secrétaire médicale est un homme.
Comment avais-je fait pour être aussi aveugle ? Alors que son frère Thomas jouait aux petites voitures avec les autres enfants, mon plus jeune fils jouait à la poupée avec les petites filles.
- Je suis allée dans un bar du Marais, puis dans une boîte gay sur les Champs-Elysées et je me suis pris la cuite de ma vie....
Tu sais, je crois que cette histoire d'homosexualité de Maxime et Damien te travaille un peu trop. Tu n'est plus toi même j'ai l'impression. Tu devrez aller consulter.
Là, il m'a énervée. Il a beau être mon fils, il y a des limites qu'il ne devrait pas dépasser :
- Tu veux que je te dise, Thomas ? Je me suis bien amusée hier soir. Comme une folle.
J'ai du sous-estimer le sens de l'observation de mon rejeton qui, dans un éclair de lucidité, s'est exclamé :
- Mais maman.. Mais tu es saoule ?
- Voui, ai-je répondu en tournant la tête pour ne pas piquer un fou rire.
Les ennuis se sont évidemment poursuivis. J'ai appris à mes dépens qu'il n'y a rien de plus difficile que de trouver un taxi à Paris un samedi soir... en particulier lorsque l'on a plus toutes ces facultés. Les taxis sentent les gens bourrés à des kilomètres à la ronde et prennent un soin tout particulier pour ne pas les accepter à leur bord.
Quelques dizaine de mètres plus loin, je suis arrivée à l'intersection avec la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie. J'ai choisi de tourner à droite pour poursuivre mon exploration. J'avais l'impression d'être l'invité de Bienvenue en Terre Inconnue.