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Critique de Levant


De Baudelaire, né en 1821, nous avons des portraits photographiques. Ils ont été figés par les premiers clichés de cette innovation de l'époque, certes réservée aux avant-gardistes fortunés, dont Gaspard-Félix Tournachon, alias Nadar, était un fervent.

Si j'évoque ces portraits photographiés, c'est qu'en les regardant, je suis resté confondu par la fidélité avec laquelle ils évoquent la personnalité tourmentée de Charles Baudelaire. Son visage est marqué par la cruauté du destin et la rancoeur que Baudelaire lui voue. Ne lui a-t-il pas refusé avec une opiniâtreté féroce la reconnaissance de son talent de poète. Une reconnaissance qui ne viendra que trop tard et ne lui aura pas permis de vivre décemment de son art.

Baudelaire a eu mal à la vie. Son visage nous le clame. Son regard fixe avec une présence étonnante l'objectif de la photo. Il en est presque insoutenable. On a l'impression que du fond de son tombeau il nous crie combien le sort a été impitoyable avec lui pour ne pas faire éclater ce talent dont il était convaincu. On s'immerge et se noie dans ce regard. Il est un gouffre obscur et insondable. Il nous absorbe dans les ténèbres de son infinie tristesse.

Les fleurs du mal. C'est le titre de son recueil de poèmes qui conférera à son souvenir la célébrité tant convoitée de son vivant. Ce titre nous dit toute la dualité d'un personnage dont le génie n'a fait éclore que des coroles de douleur.

Lisons cet extrait qu'il adresse à son lecteur, non sans avoir salué au préalable son maître, le "poète impeccable", le "parfait magicien ès lettres françaises", Théophile Gautier, en préambule de son recueil maintes fois augmenté tout au long de sa vie :

C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !
Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.
Ainsi qu'un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d'une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

C'est l'Ennui ! – l'oeil chargé d'un pleur involontaire,
Il rêve d'échafauds en fumant son houka.
Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,
Hypocrite lecteur, – mon semblable, – mon frère !
Spleen et idéal

Jean-Baptiste Baronian nous destine une très belle biographie de ce poète à la gloire posthume. Il nous fait comprendre pourquoi ces fleurs sont celles d'espoirs toujours déçus. Les fleurs du mal.
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