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Critique de MaminouG


Il est ainsi des écrits qui laissent des traces indélébiles. Parce que vous vous dites que vous auriez pu, que vous devriez peut-être, qu'il serait, aurait été bien de vous plonger, vous aussi au fond de votre âme, de faire revivre votre mémoire, de parler, d'interroger, de chercher et surtout de ne pas lâcher. Parce que pour préparer un avenir joyeux, ou tout au moins vivable, il faut d'abord solder le passé. Parce que les mots, toujours les mots, surtout les prononcer, ne rien taire, tout cracher, le bien, le mal, la douleur, les regrets et les remords. Parce qu'on ne se construit pas sur des faux-semblants, des non-dits, des mystères, parce qu'on peut en mourir. Pour tout ça, je le répète, il est des écrits qui laissent des traces indélébiles et celui de Marie Barraud "Nous, les passeurs" en est un.

Je l'ai lu en une nuit d'insomnie, ce premier roman. Je l'ai refermé, il était quatre heures, plus que trois avant que le jour ne se lève et je me suis endormie avec la voix, que j'imagine douce, de l'auteur. Car c'est d'elle dont il s'agit qui part à la recherche de ce grand-père dont personne ne veut parler. Son grand-père paternel, Albert Barraud, médecin à Bordeaux, grand résistant arrêté par la Gestapo et emmené au camp de Neuengamme en Allemagne. Ce grand-père est un héros qui aurait pu maintes fois s'évader mais n'a jamais voulu quitter ses compagnons d'infortune. Il voulait les protéger, les soigner jusqu'au bout. Il mourra "bêtement" le 3 Mai 1945.

L'auteur organise tout un travail d'investigation à l'aide d'archives et de rencontres, de visites, de recherches, de recoupements. le récit de cette quête nous permet, de remonter le temps, de fréquenter les lieux, d'entendre des voix, de sentir… de comprendre. Et au regard de l'émotion ressentie lors d'une visite du camp de Mauthausen, alors que je n'étais en rien concernée à titre personnel, je peux imaginer l'insoutenable douleur à la vue des lieux dans lequel Albert avait "survécu" tant de jours.

L'écriture est délicate, fine, débordante d'amour et de sensibilité. Tel un sauveteur qui plonge en eau glacée pour secourir un nageur de la noyade, Marie n'a de cesse de vouloir sortir son père de la colère, du désespoir dans lesquels l'absence du père l'a laissé. Il aurait souhaité un père et non pas un héros. Marie a su le lui rendre, à lui, mais aussi à elle qui désormais peut commencer à vivre.

Premier roman éblouissant.

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