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Critique de Ziliz


Pour une version courte et pas politisée, commence à (1) et arrête-toi aux pointillés. Tu peux même découper ton écran bien droit, grâce à eux !
Pour un avis long et bourré d'extraits, de témoignages, va directement au (2), et si ça te parle, ne t'arrête surtout pas là. Lis cette BD dans la foulée. Parce que tu peux avoir l'impression que j'ai tout recopié comme une feignasse au lieu de faire un billet avec mes mots à moi, mais non, loin de là. Les auteurs et ceux qu'ils ont rencontrés ont plein de choses à nous dire, à nous apprendre.

(1)
Dans ce livre, il y a des gens noirs qui sont partis de chez eux, et des gens blancs qui les aident. Ça se passe à la frontière franco-italienne. Pourquoi tout ce bazar ? Soit ils ont le droit de venir et ils viennent, les étrangers ; soit ils n'ont pas le droit et ils ne viennent pas 'chez nous'.
Y a aussi des policiers (souvent contre les Noirs, mais pas forcément) et des Vikings (toujours gentils avec les Noirs).
Sinon, c'est bien dessiné, et Menton, ça a l'air joli. J'ai colorié avec du bleu, du jaune, du vert quand y avait la mer et le soleil et les montagnes, parce que du noir et blanc, c'est trop triste pour des beaux paysages comme ça.

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(2)
• « Menton : le bonheur, dessiner. Troubs est sur une barque au milieu d'une mer de solitude intérieure. Dans son dos, il y a une falaise, des fils de fer barbelés, des hommes qui se noient. »

• « Ils arrivent d'ici, et ce ne sont pas les premiers. Il y a eu nous, les Italiens, les Juifs, ceux de l'ex-Yougoslavie, les Tunisiens... »

• « Qui peut croire qu'on peut empêcher le déplacement des humains ? »

Oui, hein, qui peut croire ça !? Notamment parmi ceux qui s'indignent depuis plus de 70 ans contre la Shoah. Les autres, je les exclus d'emblée, leur cas est désespéré.

C'est ce qui se passe dans les Alpes, pourtant. Pensons aux petits activistes blondinets de Génération Identitaire qui surveillent et bloquent farouchement l'accès à notre douce France.*

Et ça se passe partout en France (Calais, Dunkerque, Nantes...), "grâce" au(x) gouvernement(s) :
• « La formule célèbre de M. Rocard, sur 'la France qui ne peut pas accueillir toute la misère du monde' - formule reprise récemment par M. Macron, pour justifier une politique de grande fermeté à l'égard des migrants économiques - est d'abord un total non-sens, si l'on pense à la proportion de réfugiés que comptent de petits pays comme le Liban ou la Jordanie. C'est surtout un déni d'humanité insupportable. »
(JMG Le Clézio, préface)
••• pour les propos de Michel Rocard, voir le commentaire de Bidule62 ci-dessous •••

Les auteurs, Baudoin & Troubs, sont allés en 2017 du côté de la vallée de la Roya, où habite Cédric Herrou, ce formidable monsieur qui s'est fait arrêter plusieurs fois pour avoir aidé des migrants à passer en France.
Il n'est pas tout seul, dans le coin, à être sympa, dévoué, généreux : on peut aussi voir Jacques (blog Jacques Perreux), un curé, un médecin, René Dahon, les 'Vikings' (qui « donnent et n'attendent rien en retour, ça réconcilie avec l'humanité »), Claudine et son ami agriculteur bio, Irène, Hubert Jourdan. Et tous ces bénévoles de 'Roya citoyenne' ou d'autres associations. Et ça réchauffe le coeur, cette solidarité.

Pourquoi font-ils ça, ces gens ? Est-ce si naturel d'aider son prochain, quand, dans les villes, tout est fait pour dissuader les SDF ('de souche' ou d'ailleurs) de s'installer dehors (mobilier urbain empêchant de s'allonger, espaces verts barricadés, camps fréquemment démantelés...), sans leur proposer de solution digne ?

* * * * * * * * beaucoup d'extraits * * * * * * * *
Les auteurs ont interrogé quelques personnes qui aident :
- Delia : C'est à cause de mes parents, ils m'ont élevée comme ça.
- Nazario : (...) pour aider, pour être avec ceux qui aident, avec l'humanité. Il faut revenir à l'homme et ses libertés primordiales.
- Jacques : Dans le village planétaire, chacun devrait être libre de s'installer où il veut.
- Andrée : J'ai deux raisons pour faire ce que je fais. Depuis toute petite j'ai eu le désir d'aider. Il n'a pas cessé de croître. Et puis j'ai eu une fille handicapée, alors ouvrir les bras est devenu ma vie.
- Claudine : Je me demande pourquoi les autres ne le font pas. Mais peut-être qu'on peut dire que je le fais parce que mon père était juif roumain, qu'il a été caché pendant la guerre, qu'il a perdu ses parents dans un camp. Il n'en parlait pas, je l'ai découvert à l'adolescence. On peut dire que c'est une raison.
- Pascal, photographe : Parce que quand ça a commencé, je vivais à Breil, ma fille avait deux ans. Je veux un monde bien pour elle, qu'elle soit fière de son père.
- François-Xavier, dit 'Tchoi', prêtre : Je suis vivant aujourd'hui. Je croise des vivants, alors je leur souris. Je suis l'aîné de 8 enfants, j'ai toujours l'instinct de protéger les autres. (...) J'estime qu'on a le droit de se révolter quand on pense qu'une loi n'est pas juste.

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Baudoin & Troubs ont également échangé avec des migrants, essentiellement des hommes jeunes originaires du Cameroun et du Soudan, après avoir instauré avec eux un rapport de confiance (je te dessine, et je t'écoute : donne-moi tes mots, je les partagerai ; c'est important de faire connaître des parcours individuels, ça ré-humanise le drame collectif et impersonnel de l'exil).

Ces hommes sont épuisés moralement et physiquement, le trajet a été long, ils ont subi là-bas ou en route viol, torture, esclavage. Ils ont besoin de répit, de repos, de manger, d'avoir un toit, d'être traités dignement et chaleureusement (on connaît la pyramide des besoins de Maslow), d'apprendre la langue, avant de pouvoir démarrer la nouvelle vie dont ils ont rêvé.

Si on se sent 'envahis' par ces personnes en exil, on peut regarder l'histoire coloniale de pays d'Afrique, d'Asie, d'Amérique ; le bordel que nous, les Européens, y avons mis... Arte diffuse d'ailleurs une série très intéressante en trois parties sur le sujet depuis hier 'Décolonisations' (7, 14 et 21 janvier, ou en replay).
Et on peut aussi penser à la façon dont l'Occident se sert encore, notamment pour SES matières premières...

Sur le sujet des migrations actuelles vers l'Europe, lire aussi lire 'Paris-Venise' (F. Oiseau), 'Douce France' (Karine Tuil), 'Village global' (Geffroy & Lessault), etc.
Je conseille également le film 'Les Invisibles', sur les laissés pour compte, même 'français', ces gens à la rue dont certains populistes prétendent se préoccuper pour légitimer le refus de l'immigration.

Je ne sais pas trop de quoi il parle, Cali(méro) dans cette chanson, mais ça me semble bien coller avec l'admirable esprit de 'nos Justes' du XXIe siècle.
♪♫ https://youtu.be/kkVPFVj-g9U
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* https://www.liberation.fr/france/2018/04/22/chasse-aux-migrants-dans-les-alpes-les-xenophobes-au-sommet_1645146
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