AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Presence


L'histoire se déroule juste après Avengers versus X-Men. Il n'est pas besoin d'avoir lu AvX Conséquences pour comprendre les enjeux. Ce tome regroupe les épisodes 1 à 5 de la série débutée fin 2012. Ces épisodes sont réalisés par Brian Michael Bendis (scénariste), Stuart Immonen (dessins), Wade von Grawbdger (encrage) et Marte Gracia (mise en couleurs).

Dans l'école Jean Grey pour surdoués, Hank McCoy (Beast) souffre d'une maladie qu'il craint être létale. En Australie, le gène de la mutation se déclenche chez Eva Bell. le résultat étant spectaculaire, Cyclops (Scott Summers), Magneto (Max Eisenhardt) et Emma Frost interviennent pour la prendre en charge. Lorsqu'un autre nouveau mutant se manifeste dans le Michigan, ils interviennent à nouveau sous les caméras de la télévision et au milieu de destructions. Scott Summers lance un appel passionné à tous les mutants pour réclamer leur droit à la liberté et à l'égalité. En visionnant cette intervention, Ororo Munroe (Storm) et Hank McCoy sont persuadés que la prise de position de Summers (de nature révolutionnaire : les mutants doivent se battre pour obtenir une place dans la société) conduira inéluctablement à une guerre fratricide entre mutants. Peu de temps après, les 5 X-Men originaux (Hank McCoy, Scott Summers, Jean Grey, Bobby Drake et Warren Worthington) sont transportés à l'époque actuelle pour se confronter aux individus qu'ils sont devenus des années plus tard.

Comme le montre la couverture le concept de base de cette nouvelle série des X-Men est d'amener les X-Men originaux dans le présent, à une époque où ils ont encore leur costume noir et jaune, et où Jean Grey n'a pas encore développé ses capacités télépathiques (en gros pendant l'épisode 8 d'Uncanny X-Men de novembre 1964). Il serait injuste de réduire ce premier tome à ce seul dispositif narratif. Après avoir passé 9 ans à la tête des séries Avengers (de 2004 à 2012), Brian Michael Bendis profite d'AvX pour changer et s'installer à la tête des séries X-Men (celle-ci et "Uncanny X-Men"). L'enjeu est de taille : Bendis est-il encore capable d'écrire des histoires de superhéros intéressantes ? Pourra-t-il redonner de la cohérence aux innombrables séries X-Men et ramener les mutants dans les meilleures ventes ?

Premier constat : ces épisodes se lisent tout seul, d'une traite. Même le lecteur blasé s'interroge sur la manière dont Bendis s'y prend pour déplacer les tous premiers X-Men dans le temps (avec une confiance toute limitée parce que les histoires de voyage dans le temps à la sauce Bendis, c'est expéditif et nébuleux). Bonne surprise, au bout de quelques pages, les personnages ont pris le dessus, et cette accroche intrigante passe au second plan. Autre bonne surprise : Bendis ne délaie pas la sauce et 3 des X-Men originels rencontrent leur contrepartie contemporaine dans ce tome (Bobby face à lui-même vaut le déplacement). Troisième constat : le maître mot est effectivement "consistance", et non pas décompression. En 5 épisodes, Bendis s'assure d'avoir posé les bases de la série, au travers de beaucoup d'éléments et d'informations, et d'encore plus de personnages. Il lui faut placer l'école Jean Grey et son personnel (la partie Wolverine & X-Men), l'équipe de X-Men originels, l'équipe de Scott Summers, et introduire 3 nouveaux mutants (Eva Bell, Christopher Muse, Benjamin Deeds). Il le fait avec un art consommé du dialogue qui permet d'insuffler un minimum de personnalité dans chaque personnage, et même nettement plus pour la majeure partie. Il trouve le point d'équilibre entre la dramatisation des événements et une forme d'humour léger qui évite au récit de sombrer dans la tragédie emphatique et pesante. Quatrième constat : au fil des pages, le lecteur a le plaisir de voir que Bendis s'est fortement investi dans cette première histoire. Cela apparaît à la fois dans le foisonnement de détails et la densité de l'intrigue : Logan donnant un cours aux élèves de l'école Jean Grey sur la stratégie à adopter quand on est attaqué par un maître ninja, les conséquences différées du passage de la force Phénix sur Terre, etc. Cela va de l'anecdotique (un conducteur de convoi incapable de se sortir de la tête, la chanson "Roadhouse blues" des Doors, sur Morrison Hotel), au plus essentiel presque philosophique (la distance qui sépare la conviction théorique de la nécessité de coexister avec les mutants, et la tolérance gênante dans la réalité).

En grattant un peu il est possible de trouver quelques défauts à cette histoire. Bendis saura-t-il vraiment expliquer comment les X-Men originels peuvent exister plusieurs années après sans que cela ne modifie tout ? Avoir fixé l'âge d'Hank McCoy originel à 12 ans ôte toute crédibilité à ce personnage, d'autant que Bendis ne le fait pas se comporter comme un enfant de 12 ans. le récit est plus ou moins accessible à de nouveaux lecteurs surtout quand Jean Grey découvre dans un flash visuel (sur une double page) ce qui lui est arrivé depuis (et d'ailleurs comment le personnage dans l'esprit duquel elle lit tout ça peut-il se souvenir de moments auxquels il n'a pas assisté ?). Mais il s'agit de détails qui sont vite oubliés avec le réel plaisir de lecture, renforcé par des dessins tout aussi efficaces et agréables que le scénario.

Dès les premières pages, il est visible que Immonen a eu le temps (et l'envie) de réaliser des pages et des cases qui ne se limitent pas au minimum syndical. Afin de donner plus d'ampleur aux actions, il recourt régulièrement à des cases s'étendant sur 2 pages en vis-à-vis et il adapte sa mise en page à chaque séquence : de la pleine page pour une action spectaculaire, à 7 cases dans une page avec une mise en scène adéquate pour des dialogues. Il détaille les décors lorsque cela s'avère nécessaire : le bureau de la directrice de l'école Jena Grey, le bureau du directeur de l'école pour surdoués (celui de Charles Xavier, dans le passé, magnifique tapis), le bazar dans le laboratoire d'Hank McCoy, la double page consacrée à la vue d'extérieur de l'école Jean Grey, la base souterraine de l'équipe de Cyclops, etc. Il sait aussi oublier les décors lorsque la case est déjà surpeuplée du fait du nombre de personnages. le lecteur passe donc de page en page en découvrant de nouvelles dispositions, de nouveaux visuels tous intéressants, tous lisibles malgré la densité d'informations. Et Immonen dessine une Jean Grey au pouvoir de séduction incommensurable, sans jouer sur ses attributs sexuels. le lecteur un peu âgé pourra même se sentir un peu coupable de succomber au charme naturel d'une jeune femme aussi jeune (pas sûr qu'elle ait atteint ses 18 ans, sûr du contraire même. Mince c'est punissable par la loi !).

Malgré toutes les réticences légitimes que le lecteur peut avoir devant un dispositif qui sent l'artifice à plein nez et une énième relance d'une série dont la pérennité est plus que sujette à caution, il est indéniable que la lecture de ce tome est très divertissante, que les personnages sont très attachants, que la situation est pleine de suspense et qu'il tarde de découvrir la suite. Bendis & Immonen ont atteint leur objectif : raconter une bonne histoire des X-Men, et c'est déjà beaucoup. L'histoire continue dans All New X-Men T02 (épisodes 6 à 10).
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}