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Critique de jcjc352


Une très jolie première de couverture et un titre enflammé qui annonce la suite. Un sujet sur la Kabylie ou il est question de pauvreté, de religion et vie au village tout simplement. La Kabylie, très beau pays oublié des dieux mais pas d'Allah a une population dense pour une terre pauvre pour une société archaïque qui n'évolue que très lentement
Dans le village la mère Nassira, veuve, analphabète continue de travailler pour ses fils qui vivent à Alger et ne pense qu'à eux. Elle les a élevé seules avec beaucoup d'amour et de clairvoyance faisant d'eux des hommes capables de trouver leurs voies et a acquis, grâce à sa pugnacité l'estime de ses voisins. Hassan l'aîné a suivi celle du devoir institutionnel: il est devenu policier. Selim garagiste, fervent croyant a choisi la voie de dieu. Comme lorsqu'ils étaient enfants tout les oppose. L'aîné est le chef de famille en l'absence du père le cadet le vit très mal et Nassira si elle s'en est aperçu l'a mal interprété mettant cela sur une rivalité normale entre enfants. Mais connaît-on vraiment ses enfants?
Une banale situation de famille si ce n'est que dans cette campagne pauvre ou l'avenir est très incertain les habitants sont solidaires les uns des autres et les imams très présents. Certains prêchent un islam archaïque pur et dur avec pour conséquence la montée en puissance de la violence religieuse. L'Algérie coupée en deux est en proie à la guerre civile et ce juste après l'indépendance qui promettait des jours meilleurs
J'avais avec ce livre la crainte d'une écriture trop féminine trop portée sur l'affect plutôt que sur le contexte et en fin de compte j'ai trouvé le livre très bien équilibré.
L'écriture pourrait être aussi bien celle d'un homme et cet aspect là est intéressant non pas que le style soit non genré mais qu'au contraire soit si universel. Coté affectif les états d'âme de Nassira sont sincères, ses interrogations, ses espoirs, ses soucis quotidiens sont simples comme une ceux d'une personne non éduquée peuvent l'être, simples mais authentiques.
Un portrait de femme très bien senti, très réaliste et un personnage de Nassira très attachant: on aimerait avoir une mère comme ça. Les autres personnages, Leila jeune femme institutrice qui représente l'avenir, la voisine sont aussi bien traités même celui des hommes et c'est étrangement surprenant.

En outre Kabira Beniz nous comble en nous faisant découvrir la vie quotidienne des femmes algériennes et leurs activités. le marché, lieu incontournable pour une femme ou sa présence est considérée comme indispensable, la préparation des plats à la maison avec la voisine et surtout le hammam lieu de rencontre et de papotages pour les villageoises une excellente scène longuement décrite des soins corporels des femmes. Kabira Beniz se permet même d'être franchement graveleuse sur les problèmes de sexe avec des anecdotes très croustillantes pour le plus grand bonheur du lecteur.
Une sororité vraiment réconfortante dans ce hammam plein de vie qui est une oasis de douceur.
Elle décrit avec méticulosité le comportement de certain hommes véritables tyranneaux domestiques qui prennent plusieurs femmes et le quotidien infernal vécu par ces épouses. Elle est en outre très amère sur la pusillanimité des épouses consentantes bien qu'elle en montre les limites. L'absence d'éducation nuit particulièrement aux femmes et rend le patriarcat est tout puissant

En ce qui concerne la religion Kabira Beniz dresse un bilan très sombre du fanatisme qui prévaux en Algérie et qui gangrène la société et les âmes faibles. Les discours obscurantistes de prédicateurs d'un autre âge qui perdurent et dont on voir mal comment les combattre.

La narration peut être considérée comme une chronique de la vie féminine algérienne et rien ne permet de la considérer comme un drame si ce n'est que la chute abrupte et terrible concentrée sur deux pages. Un effet très efficace et certains auteur de thrillers devraient en prendre de la graine
Kabira Beniz a trouvé, mis à part le titre un peu déclamatoire, le ton juste. Les formules religieuses qui entrecoupent le texte qui sont pénibles pour un lecteur athée n'alourdissent pas la narration passent ici très bien car elles correspondent parfaitement à la vie des musulmans. On est pris d'emblée par le climat mis en place et le style narratif est excellent. Une très belle réussite et ce pour son deuxième livre ce qui donne envie de se précipiter sur le premier « Le voile de la mariée »
Voilà de la très bonne littérature et un grand moment de plaisir.
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