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Critique de Heval


Heval
25 novembre 2021
Il a de l'imagination, c'est sûre; il raconte bien l'histoire, c'est certain mais il en fait trop. Il écrit trop. C'est long, trop long, ronflant et parfois ennuyant. L'histoire s'étire et s'étire tant qu'elle casse le fil. le texte perd alors de son énergie et donc de son intérêt. Mais c'est dure aussi. C'est la barbarie, la guerre en Syrie. Daech tue, assassine, torture, viole, capture, esclavagise. J'ai donc lu avec beaucoup d'appréhension, le coeur serré et nauséeux. Mais j'ai lu.


J'ai lu le sort des Kurdes de confession yézidie et, comme à l'accoutumée, j'ai remercié ma chance; une chance que n'ont pas mes compatriotes kurdes restés au pays. Pour eux, j'ai une peine immense car ils endurent tout ce que je n'ose imaginer pour ma famille et mes enfants. Je suis triste pour ces tués par centaines, pour ces familles décimées, pour ces femmes et enfants capturés, violés, vendus et tenus en esclavage. Je suis triste pour eux et je remercie l'auteur de les rappeler à notre mémoire car elle oublie toujours, éternellement. 


En revanche, gros bémol, je l'invite à revoir sa copie pour ce qui concerne les personnages kurdes du YPG. Ils manquent cruellement de crédibilité et je dirai même - si je n'étais pas aussi gentille - qu'il s'agit là d'une pure propagande anti-YPG comme on la retrouve dans les interventions de journalistes "anti-kurdes". Je l'ai déjà dit ici, la fiction n'autorise pas tout. Quand elle se confronte à la réalité, elle ne peut s'extirper de la question de la vérité. Elle doit donc avoir le soucis de la justesse et de la justice dans son propos. La guerre en Syrie étant une guerre contemporaine, le mouvement kurde ayant une existence réelle, l'auteur ne peut écrire tout et n'importe quoi sous le sceau de la fiction. Je ne peux donc laisser dire que le YPG soit capable d'immoler un ennemi et de filmer cette barbarie. La pratique, celle de Daech, est interdite au sein du mouvement kurde qui prohibe tous les comportements inhumains et dégradants. le YPG fait la guerre, oui, mais il tente, dans cette guerre barbare et indigne, de maintenir le sens de la dignité humaine. Il en va de sa morale, de sa philosophie et de la conception qu'il se fait de l'humanité. Il faut ne pas connaître le YPG pour oser écrire pareille connerie.


De même, il est peu probable que vous entendiez un membre du YPG tenir des propos vulgaires à propos des femmes yézidis tenues en esclavage sexuelle par Daech. Non, un membre du YPG chargé de la surveillance d'un camps de réfugiés pour les Kurdes yézidis ne dirait pas, devant une recrue étrangère de surcroît, qu'une femme yézidie est une « pute » qui a été « baisé par les chiens de Daech ». Sauf si ce membre est un « civil » qui n'a pas reçu l'éducation politique imposée au sein du mouvement. Et même dans ce cas-là, j'ai un doute sur la crédibilité du personnage. Enfin, pour finir, puisqu'il faut en finir avec les exemples, l'administration du Rojava ne considère pas les « lioncaux du Califat », surtout s'ils sont, comme dans le roman, des petits Kurdes yézidis, comme des « traitres » ou des personnes à « emprisonner ». Ils sont, au contraire, considérés comme des victimes et sont, à ce titre, pris en charge et soignés dans tous les sens du terme.


Alors, je dirai qu'il suffit ! Ça suffit de relativiser et de considérer que dans cette guerre syrienne tout le monde se vaut. Non ! La guerre menée par le YPG, quoi que l'on puisse penser de lui et de ses actions, n'est pas celle menée par Assad ou Daech ! La philosophie politique du YPG, ses valeurs, sa morale et ses pratiques se distinguent en tout point des autres mouvements armés et ne pas le voir c'est, au mieux, une ignorance crasse ; au pire une propagande anti-kurde détestable et méprisable. Alors désolée mais je ne peux conseiller ce roman.
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