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Critique de Bookycooky


Psagot, une implantation israélienne de colons ultra-orthodoxes dans les territoires occupés de Cisjordanie. C'est là que grandit l'auteur, qui y arrive à quatre ans.
Une Vie d'enfant où la normalité peut n'être vécu que sur le terrain de sport, dans ce village cerné de barbelés et où grouillent des soldats, et d'où l'on ne sort pas. L'autre possibilité d'évasion étant les livres, disponibles dans une Bibliothèque publique dont les responsables apparemment n'ont pas grande idée de ce qu'ils dispensent.
Une atmosphère triste voir sinistre, où l'endoctrinement et le lavage de cerveau pour attiser la haine contre l'Autre sont de premier ordre. S'y ajoute un climat glacial dans la famille, qui l'enveloppera durant toute son enfance. Une enfance où La Peur de l'environnement menaçant ( « l'odeur, la poussière, la couleur de peau, l'habillement , le visage des gens »)va devenir une constante de sa vie. Une Peur qu'ils ont en un premier temps rendu réalisable, puis l'ont convoqué et finalement l'ont généré, comme dirait Baricco «  une créature mythique », qui n'est nullement une fable, au contraire réelle, mais grossie et rendue puissante grâce à l'imagination engendrée par leurs propres actes; personne n'ayant obligé ces colons ultra orthodoxes à aller s'implanter en Territoire palestinien confisqué, qu'ils ont transformé en Far West, où les actes de vengeance, les démonstrations de force sont tolérées d'un soutien mi-caché mi-affiché du côté israélien. Une incroyable injustice, une triste réalité au su et à la vue du monde entier !
Pourtant la curiosité dépasse souvent la peur, les cerf-volants des enfants arabes qui volent sur leurs têtes, les ouvriers palestiniens qui travaillent dans le village, le marchand au coin de la mosquée où ils achètent leurs légumes.....

Yonatan Berg, dont je viens de lire le deuxième livre, nous décrit et analyse superbement cette enfance très peu normale pour ne pas dire pas du tout, à travers les structures et divers incidents,"J'en ai le coeur serré car notre enfance , la mienne et celle de mes camarades , avait beau sentir qu'il existait une autre possibilité, plus normale, nous n'arrivions pas à l'atteindre." Étrangement ceux sont les ruines d'une cité antique proche de l'implantation où Yonatan s'échappe, pour fuir l'arrogante rigidité de l'implantation et l'étouffement de sa famille pour y rêver et méditer, qui lui donneront son ticket de sortie "non seulement du village mais d'un milieu, avec son approche, son langage, sa vision du monde et ses traditions." Mais arriver à trancher net avec ses origines est très compliqué, pas facile de se dépouiller de l'enfant qu'il a été, nier tout son passé . Il cherche la voie qui le mènera du passé au présent......une voie difficile tant le mal-être d'être coincé entre le religieux et le laïc est fort.....car une éducation qui obéit à des règles très strictes et rigides et une permissivité totale sur des terres hors civilisation, qui dépend de son propre système de lois, surveille en permanence ses propres frontières est le paradoxe de la Vie des enfants et adolescents grandis sur les territoires occupés. D'autant plus que le service militaire donnera l'ultime coup de massue.

Un excellent récit intime émouvant où la Littérature sera la voie pour sa reconstruction. Une voie qui pourrait aussi être l'occasion même si infime, de pouvoir donner à ses compatriotes "la possibilité d'un autre regard? D'autres regards ?" sur l'Autre dans ce conflit crucial qui pourrit le Moyen Orient, ainsi que tous les maigres espoirs du peuple palestinien, du moins ce qu'il en reste.


"Comment expliques-tu que les gens d'ici passent tranquillement en voiture malgré le camp de réfugiés qu'ils ont sous les yeux?" me demanda Avishai.
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