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Citations sur Le bon sens (20)

Charles VII n'était pas venu à Rouen pour assister à la proclamation de l'arrêt annulant la condamnation de Jeanne, fille de Jacques d'Arc et d'isabelle Rommée, par l'archevêque de Reims, dans le palais archiépiscopal, le matin du 7 juillet 1456.

Quel geste pour l'histoire s'il avait écouté ce qu'on lui conseillait. Jusqu'au bout, il fut un petit homme dans un grand roi. Lui, Dunois, n’avait pas manqué ce rendez-vous. On devait bien ça à la paysanne de Domremy.

Un des exemplaires des articles d'accusation, sans doute rédigés par Thomas de Courcelles au mois de mai 1431, avait été symboliquement lacéré en public après que Jean Jouvenel des Ursins l'avait ordonné. Bouillé, voulant honorer son ami, avait proposé à Manchon de procéder à l'opération de ses mains. Horrifié, le libraire avait repoussé l'offre vigoureusement. La destruction d'une archive, quelle qu'elle fût, quel qu'en soit l'auteur, lui était insupportable.
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Il avait bavardé avec Villon, après que celui-ci avait bu deux ou trois coupes de vin pour oser s'approcher du prestigieux vainqueur des Anglais. Dunois n’aimait pas revenir sur ses campagnes, sauf avec ses camarades. Les gens s'imaginaient des choses ridicules sur la guerre, qui est laide et cruelle. Villon avait abordé le sujet, et puis avait renoncé à poursuivre lorsque le lieutenant général l’avait coupé pour lui dire que Jeanne n'était pas lorraine, mais née en Barrois, et préciser que si elle avait été lorraine, née sur l'autre rive de la Meuse, elle se serait trouvée à cette époque du côté des Anglais.
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Tout était de la faute des Anglais et de l'horrible Cauchon, un traître au nom prédestiné. Justice pour Jeanne! Justice pour la Pucelle! Justice pour la fille de chez nous!
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Les deux chefs anglais se souvenaient des heures de gloire quand les léopards d'Angleterre galopaient irrésistiblement à travers la France. Le plus grand royaume de la chrétienté à leur merci, tout était possible, jusqu'à ce que surgit cette vachère, cette sorcière sur la Loire. Elle avait capturé Talbot à Patay, l'avait contraint à défiler dans Orléans délivrée derrière son cheval avant d'aller faire couronner Charles à Reims. Les Bourguignons, alors leurs alliés, avaient beau l'avoir prise, vendue, ils avaient beau l'avoir eux-mêmes fait brûler ici, sur la place du Vieux-Marché de Rouen, et jeté ses cendres dans la Seine, le sortilège n'avait pas été levé. Le cycle de la gloire anglaise sur le continent maintenant s'achevait, et leur revenait le pitoyable honneur d'assister à ses derniers moments. Triste automne.
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La porte en chêne sombre, aux montants ouvragés, s'ouvrit sur plusieurs sacs cousus où étaient conservées, à l'abri des curiosités et des rongeurs, les archives les plus précieuses. Manchon en sortit un particulièrement imposant, le posa sur la table. De la pointe d'un canif, il fit sauter les points fermant l'un des côtés, puis dégagea de la toile de jute le registre qu'il contenait. C'était le procès-verbal des délibérations et du jugement de condamnation de Jeanne, fille de Jacques d'Arc et Isabelle Rommée, qui avait eu lieu à Rouen, dans le château fort du Bouvreuil, sous la présidence de l'êveque Pierre Cauchon, entre le 21 février et le 30 mai 1431, date du supplice.
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Jean de Dunois observait devant l'estuaire de la Seine les mouvements des navires battant pavillon aux lys de France. Ils avaient essuyé les tempêtes de décembre, janvier et février mais jamais n'avaient cessé leur ronde vigilante, dissuadant la marine anglaise de forcer le blocus. Privée de secours, la garnison de Honfleur ne devait plus avoir grand-chose à manger, les habitants non plus. Encore quelques boulets de fer crachés par les bombardes de Jean et Gaspard Bureau contre ses murailles, et la ville, après Harfleur, se rendrait à son tour. Assis sur un talus, le lieutenant général attendait que le fruit tombât. Près de lui, se trouvait Jean de Metz.
Au soir de l'entrée dans Rouen, Dunois était allé sur la place du Vieux-Marché où Jeanne avait été brûlée. Depuis la reprise de la guerre, le tourbillon des événements n'avait guère favorisé les méditations rétrospectives, mais dès que les clochers de Rouen avaient troué le brouillard il avait senti sa présence. "Allons Bâtard, allons!", ses oreilles avaient cru l'entendre tandis qu'il franchissait derrière le roi la grande porte de Rouen, ses yeux avaient cru la voir dans la pénombre de la cathédrale : cette silhouette menue au pas décidé, cette tête ronde à la chevelure drue et brune, ce petit visage imberbe et pâle. L'illusion avait duré une longue minute... C'était un jeune écuyer.
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Grigri soupira. Il émit une sorte de miaulement brisé, contenu, un craquement des mâchoires en découvrant ses canines. Le chat rêvait. Guillaume Manchon passa la main dans la fourrure couleur des souris que l'animal pourchassait jusque dans le songe. Il se mit à ronronner et vibrer sous la paume de son maître. Le soleil de cette fin d'août 1449 chauffait le verre et le plomb des fenêtres, éclaircissait la pénombre, mais ne pénétrait pas dans la librairie. C'était le moment de l'année où il faisait bon se tenir sous les pierres de ses voûtes. Pendant les grandes chameurs, la nuit, le notaire venait y chercher le sommeil avec la fraîcheur et un air respirable. L'odeur de l'encre, de la colle, celle du cuir des grands livres et du bois des étagères repoussaient la pestilence des rues de Rouen.
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On vit bientôt les clochers de Louviers percer la ligne de terre. Rendez-vous dans ses murs avait été donné à Dunois et Saint-Pol. Le 30 août 1449, Charles VII réunissait pour la première fois son conseil en Normandie. Tout le monde était d'accord, il fallait reprendre Rouen avant le début de l'hiver. Le reste serait une formalité. Comme un coup de pied dans l'arbre fait tomber les pommes mûres, les villes normandes dégringoleraient du chimérique projet anglais pour retrouver leur place dans le royaume de France.
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Tout le monde avait oublié. A Charles VII, au moment du procès en révision, il [Dunois] avait conseillé de témoigner devant les commissaires, comme les plus humbles de ses sujets. Le grand livre de l'histoire était ouvert, le souverain servirait la grandeur du royaume en mêlant sa voix à celle de son peuple. Saint Louis aurait agi ainsi. Le roi avait réfléchi un instant, puis avait avoué que l'essentiel, ce qu'elle lui avait dit lors de leur première rencontre dans la grande salle du château de Chinon, il ne s'en souvenait plus. Il avait ajouté que, pourtant, certains jours, la manière dont elle l'avait dit, son accent de l'Est si marqué, son enthousiasme, la précision de ses mots et le flux rythmé de son discours, lui revenaient par bouffées. C'était une joie, et il se sentait alors comme soulevé au-dessus de lui-même. Une sorte de force, qui était en elle, passait en lui. Elle avait ce don de parole, très différent de l'éloquence des clercs. A cause de ce parler lourd, traînant, ce qu'elle disait semblait monter du plus profond du pays, de la terre, du coeur du langage commun, du français lui-même. Il s'était rendu compte qu'avec cette fille qui lui était étrangère en tous points, il partageait des mots qui pour eux deux, l'un roi, né et grandi à Paris en bord de Seine, l'autre paysanne, originaire d'un petit village en bord de Meuse, désignaient et exprimaient les mêmes choses.
p. 186
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Le prêtre s'était attaché à cette fonction sans éclat, à l'abri des caprices de la hiérarchie et de ses humeurs, dans la sécurité des murs et la paix des paperasses méprisée des violents. Les routines de l'écriture le tenaient à distance, spectateur discret et indifférent, des coteries, ambitions et intrigues qui étaient la doublure cachée, bien réelle, de la vie des institutions. La sainte Eglise catholique n'en était pas préservée, au contraire. Ce qu'il avait vu au début de son activité avait suffi à le dégoûter de l'idée de carrière. Il n'aspirait qu'à faire honnêtement son métier, en gagnant son pain sur la terre et sa place dans le ciel.
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