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Critique de LiliGalipette


Tome 1 : Castelluciu
Joachim Evain, petit orphelin breton de 11 ans, est envoyé en Corse, à la colonie agricole de Saint-Antoine. Il s'agit en fait d'un bagne pour enfants. « Nous venions de toute la France. Vagabonds, voleurs, fortes têtes, orphelins… Napoléon III voulait éradiquer toute cette « mauvaise graine. » (p. 12) Là-bas, il se lie d'amitié avec Antoine Teurice, à peine plus âgé que lui. La vie au bagne est difficile : entre les travaux éreintants, les mauvais traitements et les sinistres penchants de certains détenus plus âgés, les jeunes prisonniers doivent s'endurcir s'ils veulent survivre. « Nous autres, les bagnards en culotte courte, étions condamnés jusqu'à nos vingt ans… Autant dire que c'est notre jeunesse qu'on nous volait. » (p. 14) Joachim, sans cesse, tente d'échapper aux brutalités de Xavier Trouvé, jeune bagnard défiguré qui est bien décidé à imposer sa loi sur les plus faibles et les plus petites.

Tome 2 : Francesca
Les jeunes bagnards du premier tome ont grandi. « Sous le drapeau de la République, nous autres, les enfants, on nous remplissait de haine. » (p. 13) Désormais, c'est Joachim qui protège les plus petits. En secret et avec la complicité d'un gardien, il vit une idylle avec Francesca, une jeune fille corse. Hélas, un autre gardien, Giocanti, n'a aucune indulgence pour les jeunes prisonniers et ne leur accorde aucun instant de répit ou de bonheur. Au bagne de Saint-Antoine, les enfants meurent par dizaines, par centaines : accidents, malnutrition et suicides sont dissimulés derrière le vocable général de maladie. Pas question de laisser entendre en haut lieu que les jeunes bagnards vivent dans des conditions épouvantables. Il faut donc qu'une voix s'élève et crie la vérité. Et quelle voix est mieux placée que celle d'Antoine Teurice, survivant du bagne de la honte ?

Ce terrible épisode du Second Empire est une verrue de l'histoire, ainsi que la qualifie Frédéric Bertocchini. La définition est juste : des enfants traités comme des adultes et maltraités comme s'ils étaient les pires vermines, voilà qui a de quoi indigner quand on tourne les pages d'un manuel d'histoire. Sauf que… ce n'est pas le genre de choses dont on parle dans les manuels. Il fallait l'ouvrage de Frédéric Berocchini et d'Éric RückStülh pour ouvrir nos yeux. Cette bande dessinée est pleine de violence, mais nécessaire. Pour de nombreux personnages, pas de fin heureuse, rien que la peine et la mort. Les dessins d'Éric Rückstühl rendent hommage à la souffrance des jeunes victimes de l'administration française : les visages et les corps sont tourmentés, mais il émane d'eux la grâce farouche propre aux innocents privés d'espoir. Et même si les paysages corses sont de toute beauté, ils restent le sinistre décor d'une mise à mort minutieuse et impardonnable.
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