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Critique de Garoupe


Madeleine, 77 ans, est mise au rebut, pardon à la maison de retraite, par ses deux petites-filles, Delphine et Magali aussi dissemblable que possible, respectivement sainte-nitouche austère engluée dans un couple déséquilibré avec un type que nous pourrons qualifier de connard sans prendre un grand risque et jeune fille délurée maquillée comme une voiture volée, encore que les voitures volées sont maquillées pour être discrètes.

Madeleine se morfond dans son mouroir qui porte bien son nom. En dehors de Fatoumata, camerounaise clandestine travaillant au black dans la maison de retraite, point de salut pour Mado. A part peut-être une lueur d'espoir en la personne de Jacky et de Ferdinand, quatre-vingt balais chacun mais aucun dans le cul : gouailleurs, colériques, alcooliques, ces amis de soixante ans ne voient qu'une issue possible : faire évader Mado !

Agnès Bihl, parallèlement connue pour ses talents d'auteur interprète, aborde une multitude de thèmes sans noyer le lecteur. Des affres de la vieillesse au naufrage de la solitude en passant par la violence au sein du couple, qu'elle soit physique ou morale, et la futilité de la jeunesse, Agnès Bihl mène sa barque d'un pied marin ferme et sûr de lui, avec humour mais profondeur. Chez Agnès Bihl, on ne fait pas rimer Amour avec Toujours mais on les fait durer… ou pas.

Par petites touches, par allusions, par jeu sur les mots, Agnès Bihl, malgré quelques tendances à délayer parfois et faire assaut de métaphores multiples et successives pour dire plusieurs fois la même chose, touche à ce qu'il y a de plus humain dans ses personnages principaux : Madeleine, Jacky et Ferdinand pour ce qui a trait à la vieillesse, Delphine et Magali pour le rapport au couple, Fatoumata pour tout ce qui concerne le racisme. Elle met tout cela en opposition à des caractères odieux tels que Jean-Christophe, le mari de Delphine, phallocrate et harceleur, Connard, surnom du père de Jean-Marie et raciste devant l'éternel ou encore l'aide-soignante de la maison de retraite.

Le livre d'Agnès Bihl est touchant et sonne juste même quand il est parfois à la limite du cliché ou de la phrase toute faite, lieu commun mais ô combien représentatif. C'est l'occasion de passer un grand moment de tendresse avec les personnages d'Agnès Bihl, leur vie emprunte de liberté de ton, de pensée, d'action. En faisant vibrer notre corde sensible et notre petit coeur d'artichaut (pour ceux qui en ont une/un, évidemment, pour les autres…), elle remplit pleinement une des nombreuses missions de la littérature : « instruire en distraisant (treize ans et demi maximum) », pour reprendre les mots de Bobby Lapointe. A noter d'ailleurs la présence de multiples références musicales, plus ou moins directes, saupoudrées par Agnès Bihl avec une prédilection marquée pour Renaud, présent à plusieurs reprises… il s'agit là d'un bon goût que le fan de Renaud que je suis ne pouvait que saluer.

« - Et d'ailleurs entre nous, c'est quoi l'homme idéal ?
- Ca me parait évident : l'homme idéal, c'est celui qui fait les courses, la vaisselle, le ménage et qui, en rentrant du boulot, s'occupe de la cuisine, du linge et des enfants.
- Mouais. J'aurais dû m'en douter que l'homme idéal était en fait une femme… »

« A force de regarder dans le miroir brisé de son âme amochée, la jeune femme se mit à pleurer… Au fond, elle avait bon coeur. C'est juste qu'elle ne s'en servait pas souvent. »

« Mais la vieille dame avait le coeur en miettes. Partout, même ici dans ce paradis, la haine montait peu à peu, ça faisait froid dans le dos – à quel étage s'arrêtera donc enfin l'ascenseur pour les fachos ? »

Lien : http://wp.me/p2X8E2-qW
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