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Critique de FMK


Pour cette nouvelle édition de la Masse Critique Mauvais Genres de Babelio, je suis sorti de ma zone de confort avec ce premier roman déroutant. Merci beaucoup à ActuSF pour cette découverte au carrefour de plusieurs genres ! 

C'est le grand jour pour Ermeline Mainterre, de la Bordure : après des années d'entraînement en autodidacte et avoir passé les épreuves de l'examen en secret, la jeune fille est admise à la Loge du Beffroi, la prestigieuse école de magie de la grande Tinkleham. Depuis des siècles, les mages du Beffroi protègent les habitants de la ville et des régions alentour des terrifiants Spectres, dont les attaques provoquent chaque année de multiples disparitions. Il est temps pour Ermeline de rejoindre ce corps d'élite, et surtout de réaliser son rêve : entrer dans l'histoire comme la meilleure mage que la Loge ait jamais connu ! 

L'histoire est racontée du seul point de vue d'Ermeline, qui va découvrir un monde inconnu et se familiariser avec ses règles auprès de ses camarades. La première partie du roman démarre ainsi, forcément, avec un peu de world-building : on apprend en même temps que l'héroïne ce que recèle l'intérieur du fameux Beffroi (un vrai Tardis ce bâtiment !), le principe de la magie et notamment l'importance du chant et des cloches pour repousser les Spectres, mais beaucoup de détails sur ces derniers demeurent, à l'instar de la cité de Tinkleham, dans la brume… On est ici dans un déroulement assez classique, mais tout à fait plaisant, avec la rencontre des nouveaux élèves, les différents cours avec des professeurs plus ou moins aimables et des phénomènes étranges qui vont avoir une fâcheuse tendance à se produire quand Ermeline est dans les parages, et sur lesquels la jeune fille va enquêter avec ses nouveaux amis.

Là où le roman va se démarquer, en revanche, c'est bien avec la psychologie de son protagoniste. En effet, c'est l'ambition qui dirige toute la vie d'Ermeline. Obsédée par son but au point de se sentir supérieure à tous ceux qui l'entourent, l'adolescente va avoir beaucoup de mal à accepter le fait qu'elle n'est peut-être pas la meilleure élève de l'école, et même loin de là. Contrairement à son entourage, le lecteur a directement accès à ses pensées, qui dévoilent une colère permanente contre tout ce qui peut lui faire de l'ombre et ceux qui ne mesurent pas son fantastique potentiel. On est donc loin du tableau d'une héroïne guidée par son rêve et empreinte de bienveillance, mais bien d'un personnage avide de reconnaissance, qui ne prête pas attention à grand chose à part elle-même et les personnes qu'elle juge digne de son intérêt, à savoir celles qui peuvent la rapprocher de son but ultime. J'ai donc eu du mal, et c'était très certainement voulu, à éprouver la moindre empathie pour cette pauvre Ermeline, rapidement découragée par ses échecs scolaires et relationnels… 

Ou du moins, au début ! Car au-delà de ces préoccupations d'adolescents, Ermeline va se retrouver au centre d'événements réellement traumatisants, qui vont survenir soudainement et sans que personne autour d'elle ne puisse lui fournir d'explications. La première partie s'achève d'ailleurs sur un renversement total de l'intrigue et du ton du roman. Pour Ermeline Mainterre, alors en perte complète de ses repères et de ses certitudes, le moment est venu de se réinventer si elle veut seulement espérer survivre. Si depuis le début la narration est rythmée par des phrases courtes et percutantes, cela prend alors une toute autre dimension, comme si chaque mot comptait dans un sentiment d'urgence et une sensation d'oppression permanente. Les chapitres s'enchaînent alors, de lueurs d'espoir en cruelles désillusions, et j'ai fini par vraiment m'attacher à l'héroïne qui va descendre de son piédestal et se rapprocher de ses semblables. Malheureusement, dans cette ambiance de fin du monde, la moindre erreur a des répercussions dramatiques, et c'est dans la douleur qu'Ermeline va évoluer et tenter de lutter contre un destin que d'autres ont prédit pour elle. Mais je ne peux pas en dévoiler davantage sans entrer dans la zone spoil… 

Lorsque les carillons se taisent à Tinkleham, c'est l'avènement des ténèbres, le règne de la peur et du désespoir. C'est le retour à la vulnérabilité, qu'on soit mage ou simple humain, devant une menace invisible et omniprésente. Mais c'est aussi la fin de l'individualisme, d'un faux sentiment de sécurité prodigué par la magie, et la nécessité de se rassembler pour survivre. C'est ce décalage très marqué entre les deux parties de l'intrigue qui m'a vraiment plu dans ce roman à la croisée de la fantasy, de la dark academia, du fantastique horrifique et même du post-apo. Une très bonne lecture pour moi, qui mérite son titre de Pépite de l'imaginaire 2023 !
Lien : https://lesaffamesdelecture...
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