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Critique de Acerola13


Ce bouquin de Guillaume Blanc me faisait déjà de l'oeil depuis un petit moment, et c'est donc très curieuse que j'ai ouvert. L'auteur débute par une comparaison des parcs nationaux africains et des parcs nationaux européens, et leur représentation dans l'imaginaire de la sauvegarde de la nature. Les parcs nationaux européens sont glorifiés par le lien qu'entretiennent populations résidentes avec leur environnement, et par la mise en valeur qui en découle, à l'image du parc des Cévennes, tandis que les parcs africains doivent être purgés de leurs populations, sans quoi ils ne pourraient être « intacts ». Guillaume Blanc souligne aussi la différence sémantique employée entre Afrique et Europe : « ethnie » pour décrire les Oromos éthiopiens, « peuple » pour décrire les Bretons.

L'objectif de son essai : dénoncer le mythe d'une surexploitation de la nature africaine par les indigènes, lorsque celle-ci est en réalité due à la colonisation. Pour illustrer son propos, il se base sur le parc national du Simien, en Ethiopie, un choix que j'ai trouvé très intéressant : l'auteur rappelle en effet que si l'on considère l'Ethiopie comme l'un des seuls pays d'Afrique non colonisé par une puissance européenne, Ménélik II ne s'est pas privé pour étendre son propre empire, faisant donc de l'Ethiopie un colonisateur, du moins régional ; ce passé peut servir de clef de lecture au conflit autour du Simien et de son inscription au patrimoine mondial de l'Unesco.

Rappelant à quel point la littérature occidentale (Kipling, Blixen…) a contribué à la construction du mythe africain exempt de présence humaine, Guillaume Blanc souligne également les origines coloniales des premières associations de préservation de la nature, dont les objectifs étaient parfois plus de sécuriser des réserves de chasse pour les riches occidentaux que de protéger une nature qui aurait « atteint une capacité de charge maximale » justifiant l'expulsion des populations locales. L'auteur note que la création des parcs naturels est allée systématiquement de pair avec une réduction des droits humains, et des expulsions.

Etrillant l'Unesco et ses critères drastiques pour être recensé sur sa liste, Guillaume Blanc reprend son exemple éthiopien pour montrer que les dirigeants du pays ont des intérêts tout autant économiques que politiques à voir inscrit à l'Unesco le parc du Simien : la visibilité des sites inscrits au patrimoine mondial de l'humanité permet d'attirer des touristes et de faire grimper les prix, tandis que l'impératif de « vide » est une excuse rêvée pour éloigner les populations mursi et afar souvent en conflit avec le pouvoir central d'Addis Abeba.

Une lecture vraiment intéressante pour le point de vue décalé qu'elle offre sur la pseudo préservation d'une nature africaine que son peuple ne mériterait pas, et qui est en réalité un vase clos pour les touristes occidentaux ; à noter toutefois que je n'ai pas trouvé cet essai particulièrement bien écrit ni l'argumentation clairement structurée, même si ce n'est pas une raison pour se soustraire à la lecture si le sujet vous intrigue !
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