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Critique de RomansNoirsEtPlus


Pendant la pandémie , les migrants semblent avoir disparu des radars médiatiques comme si la situation des pays en guerre - Syrie , Libye , Afghanistan entre autres - s'était soudainement améliorée . Que nenni ! Les migrants continuent de fuir la misère et la mort en traversant à leurs risques et périls la Méditerranée après s'être délestés de leurs maigres économies auprès de passeurs opportunistes . Pour les plus chanceux , ceux qui ne se seront pas noyés , qui n'auront pas péri sous les balles d'une milice nationaliste , un camp de fortune les attend , comme celui de Moria sur l'île de Lesbos en Grèce . C'est dans ces camps surpeuplés qu'oeuvrent les ONG comme SOS Mare Nostrum , dans lesquelles on trouve des logisticiens , des médecins ou des psychiatres comme Thalia Georguis ; Thalia cette femme grecque retrouvée morte à Marseille quelques jours plus tôt .
La commissaire Anne Moracchini et son adjoint le commandant Karim Bessour sont chargés de l'affaire qui va vite s'orienter vers la fachosphère locale .
Le commandant de Palma , surnommé “Le Baron” est lui à la retraite et vit sur un bateau mouillant au port de l'Estaque . La mort de son ancienne amoureuse va le forcer à rempiler , mais pour la bonne cause . Karim , qui sait que l'aide de son ancien patron peut lui être précieuse, va lui remettre une copie d'un manuscrit écrit par Thalia .Il retrace la vie d'une ces jeunes immigrées , Amira , une syrienne qui tente de survivre depuis le départ précipité de sa ville natale, Raqqa et après un mariage forcé avec un saoudien qui aurait pu être son père .
Ce témoignage écrit , comme des indices précieux dénichés dans l'appartement de Thalia vont conduire le Baron à mener ses investigations depuis les quartiers chauds de Marseille , jusqu'en Sicile puis en Grèce à la recherche d'une douloureuse vérité .

Un roman comme un hommage aux immigrés , ces voyageurs de l'impossible qui, en passant d'un côté à l'autre de la Méditerranée , espèrent retrouver l'espoir d'une vie meilleure . Un espoir vite déçu pour la plupart . Une chance inespérée pour les quelques uns qui pourront trouver un travail et s'insérer dans cette société occidentale . Une opportunité pour ces groupes nationalistes identitaires en manque d'actions , capables du pire pour faire triompher leur “patriotisme” d'opérette vide d'humanisme . Pour une bonne partie , des nostalgiques des régimes fascistes ,portant haut leur étendant raciste et xénophobe . Des “bas-du-front” qui n'ont aucune compréhension ni aucune indulgence envers ces migrants poussés par la guerre et la misère vers d'autres contrées en théorie plus hospitalières .
Difficile de ne pas s'attacher à la jeune Amira qui a vécu le pire et a été témoin d'horribles exactions commises par l'État Islamique . Un véritable livre dans le livre que ce témoignage retranscrit factuellement par cette membre d'une ONG , associations humanitaires qui oeuvrent au quotidien pour tenter de soulager ces femmes , ces hommes et ces enfants de leur détresse physique et psychologique . L'auteur salue ici leur dévotion à cette cause qui nécessite un engagement total tout en tentant de garder une distance par rapport à ces êtres humains en détresse . Pas sûr que cette émotion puisse toujours être contenue .
Ce filigrane socio-politique engagé sert de fil rouge à ce roman policier où l'on retrouve avec plaisir le personnage du Baron . Un retraité toujours dans “le coup” qui reprend les rênes de cette enquête à sa manière : en profitant de ses qualités de mélomane pour suivre son instinct et la musique qui le conduira vers l'assassin de son ancienne amante .
Comme souvent dans les romans de Xavier-Marie Bonnot , l'auteur nous offre en prime une belle dose de mistral iodé qui caresse les murs de Marseille , cette ville qui incite au voyage et nous permet de nous évader quelques instants dans ces (trop) longs moments de confinements .
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