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Critique de Eve-Yeshe


Nous sommes en 1936, déjà l'ombre de la seconde guerre mondiale se profile à l'horizon. Émile quitte la maison familiale de la Cordot, ancienne magnanerie, pour aller faire son service militaire à Montélimar. Il rêve d'avions. le départ a été étrange : sa mère, peu démonstrative, comme à son habitude, lui a mis dans les mains, après avoir quelque peu hésité, le livret de famille.

Cadeau empoisonné car Émile apprend ainsi qu'Auguste, celui qu'il a toujours considéré comme son père, qui l'a élevé comme tel, n'est pas son père biologique. Il découvre l'existence de Baptistin, le frère d'Auguste.

L'auteur nous retrace ensuite l'histoire de la famille : les deux frères ont grandi dans la magnanerie, où père élevait des vers à soie. Auguste est handicapé de naissance, son bras droit amputé, et de ce fait, il est considéré avec un certain mépris par son père, un homme très dur, avec des « valeurs éducatives » conformes à l'époque, du début du siècle. C'est Baptistin qui sera choisi pour lui succéder dans l'entreprise familiale, au terme d'une nuit terrible où le patriarche les a enfermés tous les deux dans le noir, au milieu des cocons.

Cela ne perturbe pas trop Auguste qui est peu attiré par les vers à soie. Mais la première guerre mondiale arrive, Auguste est réformé à cause de son handicap mais Baptistin est appelé. Il va rencontrer Suzanne, confiée très jeune à un orphelinat (confiée est un grand mot d'ailleurs car il s'agit plutôt d'un enfermement avec comme prétexte une maigre rétribution pour en faire une esclave et une future épouse modèle !)

Ce roman évoque les secrets de famille, avec une famille pour le moins toxique, la souffrance et la solitude quand on apprend trop tard d'où l'on vient. Une famille d'apparence lisse, comme semble nous le promettre la couverture du livre, où les manipulations tissent leur toile tels des cocons.

Adrien Borne décrit bien également le chagrin d'une femme qui a perdu l'homme de sa vie, qu'elle a dû épousé par procuration, sous l'oeil noir d'une future belle-mère qui a tout d'une sorcière. Comment être mère quand la vie n'a plus de sens, quand l'enfant qui vient rappelle l'époux disparu, et non à la guerre en héros, mais victime de la grippe espagnole juste avant d'être démobilisé, que l'on a privé de statut de héros.

Ce roman m'attendait dans ma PAL, dont on connaît la profondeur abyssale, (ou la hauteur digne de la Tour de Babel si vous préférez !) depuis longtemps. Il avait gravi plusieurs marches d'un coup car j'ai beaucoup aimé le dernier roman d'Adrien Borne La vie qui commence il y a quelques mois.

Une image qui va rester dans mon souvenir : la rencontre de Suzanne et Baptistin sous une toile peinte, à la demande d'un prêtre, par Janiek Pulowski, un jeune homme qui a dû fuir sa Pologne natale et sur lequel courent moultes légendes…

Ce roman, inspiré de l'histoire familiale de l'auteur, est un uppercut par la profondeur de l'histoire, le côté sombre des personnages dont on sait peu de choses, en fait, on connaît les évènements qui ont jalonné leurs vies, mais très peu de choses en ce qui concerne leur personnalité, leurs émotions, même le livret de famille, personnage à part entière, nous en dit plus…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions J.C.Lattès qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteur.

#Mémoiredesoie #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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