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Critique de deidamie


« Bonjour les Babélionautes ! Aujourd'hui, un billet entre tradition et modernité avec La princesse de Clèves, de Mme de La Fayette, Claire Bouilhac, Catel et Marie-Anne Didierjean pour la couleur.

-Mais… elle est morte, Mme de La Fayette, non ?

-En effet. Nos trois artistes modernes ont adapté cette oeuvre en BD.

-Ouais, mais, pffouh, Déidamie ! On n'a déjà pas aimé au lycée, on va pas se réinfliger ça maintenant !

-Mais si ! J'ai toute confiance en Catel et je suis enchantée de retrouver Claire Bouilhac dont je n'ai lu que peu de choses, Melody Bondage notamment.

Or donc Mlle de Chartres, jeune fille à la beauté et à l'intelligence exceptionnelles, est sortie du couvent par sa mère pour préparer son mariage et apprendre la vie en société, que dis-je, en société ? à la cour plutôt. Elle est rapidement promise et mariée au prince de Clèves, qui tombe éperdument amoureux d'elle. Hélas, elle reste froide : elle ne connaît ni ne comprend ce sentiment, jusqu'au jour où elle rencontre le duc de Nemours. Que faire ? Comment accomplir son devoir d'épouse en dépit de la passion ?

-Ca y est, je m'ennuie déjà. le roman était loooong en dépit de son petit nombre de pages ! Et que de lourdeurs !

-Oui, mais là, non ! Pour commencer, j'adore le dessin, souple et gracieux, aux couleurs nettes et sobres. Les planches sont lisibles et regorgent de belles trouvailles de mise en scène : j'ai repéré d'intéressants jeux de face-à-face, de miroir, d'inversion. Les autrices lui donnent un chat, confident gracieux qui reflète ses émotions. Les flash-backs sont dessinés dans des cases sans contours aux coins ronds : tu sais du premier coup d'oeil où tu te trouves dans l'histoire.

Et j'adore la scène du coup de foudre entre la princesse et le duc de Nemours.

-Moi, il y a un truc qui me gêne.

-Ah ? Quoi donc ?

-L'apparence de la princesse. Etait-il nécessaire d'en faire un cliché de princesse, la belle blonde aux yeux bleus ?

-Bien sûr ! le texte ne donne pas de description précise, si ce n'est que les gens sont tous beaux et magnifiques. J'aime beaucoup cette apparence, avec ces yeux de biche qui la rendent expressive et ses joues pleines qui lui donnent un visage poupin. On voit le portrait d'une adolescente à peine adulte physiquement, ce qui respecte là encore l'histoire du roman : elle a quinze ans.

-Ouais mais bon… la lourdeur, quoi… et puis avec toutes ces intrigues, on va se paumer, je parie…

-Non, pas de lourdeur et je vais t'expliquer pourquoi.

Chaque partie est découpée en plusieurs séquences aisément identifiables. Ces séquences tiennent en quelques pages et se terminent toujours sur la page de gauche. Tu prends donc vite le rythme : page droite, nouveau décor : on a avancé dans le temps, l'action progresse.

Ce découpage en tranches fines présente l'avantage de ne pas me perdre d'abord, de ne pas m'accabler sous les informations ensuite, et enfin, de conserver une progression limpide du récit. La narration reste fluide jusqu'au bout.

-Bon, moi je trouve quand même qu'il n'y a aucun intérêt à lire La princesse de Clèves.

-Ah bon ? Même adaptée en super BD ?

-Même adaptée en super BD ! M'enfin, qu'avons-nous à faire avec ces questionnements absurdes sur l'amour et le devoir ? On ne vit plus comme ça, contrainte de se marier au riche prince du coin !

-Ah. Oui, en effet, si tu te questionnes sur ta vie ou cherches le frisson de l'aventure, non, en effet, ce n'est le bon roman… il conserve un intérêt cependant : celui de faire méditer sur l'amour et la psychologie des personnages. Il est possible de disserter pendant des heures sur les choix de Mme de Clèves, sur ce qu'aurait pu devenir son idylle avec M. de Nemours. Ce roman donne une réponse différente à chaque lecteur et je dirais même plus : il change selon l'âge auquel tu le lis. Ce que je percevais de l'intrigue dans ma jeunesse diffère fortement de ce que j'en saisis aujourd'hui. Ce que je perçois aujourd'hui ne se compare pas avec ce qu'éprouve une amie lectrice.

Tu peux ne pas aimer La princesse de Clèves, OK pas de problème. L'histoire est somme toute peu palpitante… en revanche, je suis obligée de reconnaître qu'elle représente un tour de force littéraire.

-Mmmmh… L'emploi du subjonctif imparfait ?

-Mais non. le voici : ce roman se prête tout entier à l'interprétation. Faut-il éduquer les filles et comment ? Mme de Clèves est-elle stupide de révéler son amour ? Pourquoi refuse-t-elle ensuite de le vivre ? Quelles sont ses raisons ? Et sont-elles légitimes ? Cette histoire laisse une profonde liberté de réflexion et offre un paradoxe étrange : une histoire simple, figée, et pourtant changeante selon qui la lit et quand ; une intrigue facile à comprendre, et qui laisse cependant le lecteur s'interroger. »
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