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Critique de Dombrow01


Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les Maquisards est tout autant une saga familiale qu'un livre militant. le discours politique est toujours présent, parfois en toile de fond, mais les maquisards est beaucoup plus qu'un livre politique, qu'un plaidoyer pour l'indépendance. On suit en détail l'histoire de plusieurs familles, toutes engagées dans le combat pour l'indépendance du Cameroun, mais l'essentiel du récit parle de la vie au village, des relations entre les personnages, des histoires d'amour plus ou moins couronnées de succès. Il nous explique comment les traditions permettent de conserver la cohésion du village, mais aussi comment elles peuvent peser sur la vie de ceux qui pensent différemment : "Notre société n'a aucune sympathie pour ceux qui se singularisent comme tu le fais".

Certains personnages sont très marqués, comme Ruben Um Nyobè, alias Mpodol, le leader apôtre de la non-violence (à noter d'ailleurs que Ruben Um Nyobè a réellement existé et qu'il était à la pointe du combat pour l'indépendance), ou Pierre le Gall, le colon qui ne connait que la brutalité, ou encore Soeur Marie-Bernard, qui pratique la charité chrétienne au quotidien. D'autres sont plus complexes, tels Amos, Likak ou Muulé, il faut dire qu'ils sont soumis à de nombreux dilemmes. Comment réagir quand la France leur propose d'être le représentant de la région bassa ? L'auteure nous dit :
"L'occupant avait une méthode parfaitement huilée et efficace pour maintenir le peuple sous sa coupe. Il choisissait un nombre réduit d'indigènes à qui il attribuait des pouvoirs afin de maintenir ou de transformer les réseaux d'intérêts locaux. le peuple subissait le double joug des colons et de leurs propres chefs."
Comment doivent réagir ceux qui sont approchés par le pouvoir colonial ? Accepter pour essayer d'influer sur la politique camerounaise au risque de devenir complice des colons ? Refuser et devenir leur ennemi, voire leur cible, et risquer de voir un pantin accepter la place ?

Le roman parle beaucoup des relations humaines et des dilemmes que vivent les militants, car l'attitude au jour le jour ne dépend pas que des convictions politiques. Ça m'a rappelé l'attitude des Français durant l'occupation, il y a eu des héros qui se sont sacrifiés, des gens qui ont joué et souvent perdu leur vie, mais aussi des gens qui ont parfois aidé l'occupant lorsqu'il y trouvaient un intérêt. Dans les maquisards on parle aussi de sacrifice et de trahison, et cela n'a rien à voir avec les convictions. Donner un résistant aux autorités coloniales peut être un moyen de régler un problème personnel, et ce pour la plus grande joie desdites autorités.

A un certain moment le discours est un peu idéaliste :
"La défaite des braves a permis à l'occupant de répliquer l'exemple camerounais, de mettre ses sbires au pouvoir de la nouvelle Afrique « indépendante », s'en sont suivies des décennies de pauvreté, de corruption qui durent encore."
Ce n'est pas si simple, la pauvreté et la corruption ne sont pas le seul fait de la post-colonisation, et c'est beaucoup trop facile de tout mettre sur le dos de l'ancienne puissance coloniale. L'indépendance n'est pas la garantie d'un gouvernement "propre" et certains leaders du combat indépendantiste ont débarrassé leur pays de l'autorité coloniale uniquement pour en devenir les dictateurs (Robert Mugabe au Zimbabwe, Isaias Afwerki en Érythrée, Sekou Touré en Guinée ...).

Les maquisards est un livre bien écrit, agréable à lire, et qui nous dit beaucoup sur les traditions du Cameroun et sur ce qu'était le combat contre le colonialisme à la fin des années 1950.
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