Je m'appelais Jane

L’émotion qui l’avait saisie avait été immense, intense. Qu’était-ce au juste ? De la joie ? De l’amour ? De la peur ? Des regrets ? « Un véritable mesclun » comme dirait avé l’accent Janine, son amie niçoise.

"Et puis d'abord, si tu avais une baguette magique et que tu pouvais faire tout ce que tu veux, sans idée préconçue ni peur pour te freiner, qu'est-ce que tu voudrais faire de ta vie ?"

Stella avait posé sa tête sur l’épaule de Jane, et celle-ci avait entouré sa fille d’un bras protecteur. Lola n’avait pas eu besoin d’entendre les mots qu’elles avaient échangés pour ressentir l’infinie tendresse qui s’était instaurée presque instantanément entre ces deux-là. Elle avait été submergée par une émotion nouvelle. Ses pensées avaient vagabondé jusqu’à son propre père. À cet instant précis, elle avait cruellement regretté de ne pouvoir poser un visage sur ce mot « Papa ». Et elle avait pris la ferme décision de parler à Bianca une fois qu’elles seraient de retour en France.

Pour rien au monde, elle ne voulait faire de mal à cette femme qui lui avait tant donné et qu’elle aimait plus que tout au monde. Tout devenait clair maintenant.

C’était le plus beau présent que la vie ne lui ait jamais fait depuis bien longtemps, et elle le savoura quelques instants, avant d’être saisie par la culpabilité. Et si elle avait vraiment fait du mal à sa fille ? Peut-être cette dernière ne se remettrait-elle jamais de l’avoir rencontrée ? Les questions avaient fini par l’épuiser et elle avait sombré dans un sommeil agité.

Il va te falloir du temps pour digérer tout ça. Mais tu le sais, quoi qu’il advienne et quoi que tu en penses, nous serons tes parents pour toujours. Ce n’est pas notre sang qui coule dans tes veines, mais notre amour. Et ça, c’est plus fort que tout…

Cela faisait si longtemps qu’elle n’avait pas senti la chaleur d’un corps contre le sien. Elle finissait toujours par fuir ses relations avec les hommes, envahie par un sentiment troublant, mêlant déception et trahison. Elle avait une vision utopique du couple. Elle cherchait sa moitié, et ne la trouvait jamais…

Je fréquente beaucoup de filles, c’est vrai. Mais elles s’évaporent généralement aussi vite qu’elles sont apparues ! Nos corps se croisent un instant. Quelques jours, parfois. Mais c’est tout. Avec toi, c’est différent. Je ne me suis jamais confié à quelqu’un comme ça. Tu es la première personne qui entre dans ce labo, je te le jure ! Je ne sais pas quel sort tu m’as jeté !

Tant qu’on ne se parle pas, on ne peut pas savoir. Depuis tout jeune tu écris ton propre scénario, seul dans ton coin. Mais ton père ne joue peut-être pas dans le même film après tout ?

Tu sais, comme me le répète sans cesse ma grand-mère, dans la vie, ce ne sont pas les faits qui comptent, mais la façon dont on les perçoit, dont on les accueille. Et même si évidemment, cette absence constitue une blessure, elle ne semble pas m’avoir autant impactée que toi.