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Critique de le_Bison


« le son de ma voix » fait partie de la catégorie de romans dont tu ne sais pas pourquoi tu l'as en main. Tu ne connais pas l'auteur, ni même le bouquin. Mais tu l'ouvres quand même, une page tu gouttes à la plume écossaise. Une seconde page, tu penses à la bouteille de whisky écossais dans le buffet. Une troisième page et tu continues de penser à cette bouteille de whisky. Quatrième page, whisky whisky. Cinquième page, ton esprit est obnubilé il se lève se sert un verre. Sixième page, tu humes ton verre. Septième page, les premières gouttes de ce liquide ambré descendent en ton for intérieur. Huitième page, tu te sers un second verre. Neuvième page, tu arrêtes de boire pendant ta lecture. Dixième page, tu te lèves de nouveau, pour te servir un autre verre et garder la bouteille à portée de main. « le son de ma voix », c'est un putain de bouquin dans une main, et une putain de bouteille dans l'autre. Et tu y restes accroché tout au long, comme scotché à ton scotch. D'Écosse, le scotch. Comme le bouquin.

Morris Magellan a une femme qui l'aime énormément, des enfants magnifiques et aimants comme tous les enfants, une villa en banlieue, des voisins, un boulot de cadre dirigeant dans une biscuiterie. La vie de château en Écosse. Pourtant… Cela a probablement commencé par un verre le midi pendant la pause-déjeuner. Puis deux… Puis le lendemain, il a pris sa pause-déjeuner un peu plus tôt. Puis le lendemain, il a mis une bouteille dans son bureau – pour les invités, les « after » réunions. Puis ensuite, il est descendu au bar à deux pâtés de son bureau avant de retourner chez lui. Il s'y éternise de plus en plus d'ailleurs. D'ailleurs, à sa femme, il dit que ce sont ses réunions qui s'éternisent et qui l'épuisent, l'assomment. D'ailleurs, il prend un cachet d'aspirine. Puis deux le lendemain, puis deux chaque soir. Matin, midi et soir. Un cycle infernal. Aspirine, whisky. Ou aspirine cognac. Morris a une grande passion pour le Cognac « Courvoisier ». le Gin aussi. D'ailleurs, il connait toutes les pharmacies du coin, qu'il fréquente à tour de rôle, pour se fournir en aspirine.

Tous les soirs, Morris essaie de faire bonne figure, devant sa femme, devant ses enfants. Ils ne sont pas dupes. Lui, non plus, à la fin. Il essaie de montrer qu'il est sobre, et même pas gai, l'alcool à ce niveau a plutôt tendance à rendre triste, avant l'agressivité. Pourtant, elle reste avec lui. Par amour. Certainement. Pour les enfants aussi. Par amour des enfants. Par pitié, peut-être un peu. Il devient de plus en plus difficile de le suivre dans cette descente aux enfers, pris dans l'engrenage de la boisson. Surtout qu'il veut s'en sortir seul, il n'a pas besoin d'aide, il boit jusque quelques verres dans la journée, ce n'est pas un mal. du moins de son point de vue.

Cela fait plusieurs mois que j'ai lu ce roman de Ron Butlin, premier du nom. J'avais besoin de temps avant d'écrire dessus. de faire le point, sur l'histoire, sur la vie, sur le niveau de ma bouteille. Les images sont fortes, frappantes. Elles cognent encore dans ma tête, comme le son de l'afflux sanguin dans mes tempes. Pas une goutte d'espoir dans ces lignes, plus une goutte de liquide ambrée dans ces bouteilles qui trainent dans le salon, dans la cuisine, dans la chambre. Un roman sans espoir qui le rend encore plus fort, fort en désespoir d'un homme qui se noie dans l'alcool de sa vie. J'ai trouvé en ce roman un chef d'oeuvre avec ce constat si triste de l'alcoolisme. Une pépite littéraire, comme ce Courvoisier, un cognac de Napoléon ou ce Glenfiddich 15 ans aux couleurs or avec ce léger goût de tourbe et de terre humide du Speyside. le grand livre de l'Écosse a été écrit par Sir Ron Butlin. C'est mon dernier mot, pas mon dernier verre. La dernière goutte est toujours la meilleure, teintée de tristesse et de désespoir, comme dans une putain de vie.
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