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Critique de SZRAMOWO


Abby, la narratrice principale, est Baby Hope, le bébé new-yorkais qui a fêté son 1er anniversaire le jour du 11 septembre, dans une garderie pour employés du WTC. Pour la société américaine, elle est un héros, un symbole de résilience et de résistance. Peut-on vivre normalement lorsque l'on est un symbole et que la plupart des personnages figurant sur la photo célébrant cet événement ont disparus ?...
Abby se cache, fuit cette célébrité. Vit seule avec ses peurs, notamment celle de succomber au syndrome du 11/09, cette toux mortelle qui frappe ceux qui ont respiré pendant plusieurs minutes, le brouillard de kérosène cendres et débris matériels et humains mêlés qui s'est abattu et a persisté aux alentours du WTC.
“Connie est morte il y a soixante-quinze jours. D'un cancer des ovaires de stade quatre. (...) Mais tout le monde sait qu'en réalité, elle a succombé au syndrome du 11 Septembre, une appellation fourre-tout pour désigner tous les problèmes de santé provoqués par l'exposition aux produits chimiques qui flottaient dans l'air à Ground Zero. Pour certains survivants, tout a commencé par une inflammation des poumons. Pour d'autres, comme Connie, c'étaient des mutations et des tumeurs, l'attaque subie se reproduisant au niveau cellulaire.”
Ses parents ont divorcé après l'attentat, sans jamais vraiment réussir à se séparer. Ils habitent au 11 et au 15 d'une même rue et se revoient souvent, pour s'assurer du bonheur d'Abby, prétendent-ils.
“Enfin, techniquement, c'est aussi chez moi, puisque j'habite autant au 11 qu'au 15 Lexington Road, ma garde étant partagée à cinquante-cinquante, conformément à l'acte de divorce. Même s'il m'importe peu de savoir où je dors : les deux maisons sont si proches l'une de l'autre qu'on a tendance à les considérer comme interchangeables. Parfois, le lundi ou le jeudi matin, quand on est à court de lait, mon père et moi allons petit-déjeuner chez ma mère. Et les mardis et vendredis, maman et moi passons remplir nos thermos, parce que papa dépense des fortunes en excellent café. Je ne réponds pas immédiatement à mon père. J'enfourne une bouchée de pizza pour gagner du temps, et tente de deviner où cette conversation va nous mener.”
Présenté comme un roman “jeunesse”, le jour où tout a basculé, est à mon sens beaucoup plus que cela et le réduire à cela serait le desservir.
Il donne tout a tour la parole à Abby, Noah, Jack, Julia, Zach, Natasha, dont les routes se croisent à l'école, dans un camp de vacances puis dans la vie. La plupart du temps ils vivent comme des adolescents : “Elle me balance ça sans me regarder, et je devine que je l'ai poussée à bout. Puis je me rends compte qu'elle lorgne Zach, à qui Natasha apprend de façon assez intime à bander un arc. Pendant ce temps, Noah porte les garçons sur son dos. Il a l'air étrangement abruti-mignon avec ses chaussettes remontées, son bermuda et son tee-shirt annonçant : Ce tee-shirt est lavé à sec, ce qui signifie qu'il est sale – Mitch Hedberg.” ;
Ils ne sont pas dupes de ce que les parents voudraient qu'ils soient ou qu'ils croient : “Je n'adhère pas à cette théorie. Ma mère excelle depuis toujours dans son rôle de parent célibataire. Elle s'est cassé le cul pour me donner tout ce dont j'ai toujours pu avoir envie ou besoin, sans jamais se plaindre, quelle que soit la quantité de vin consommée. Quand j'ai joué au petit con en CE1 en la suppliant de m'acheter des vêtements de marque alors même que je savais qu'on ne roulait pas sur l'or, elle s'est décarcassée pour me les offrir. Quand elle cuisinait, elle me faisait toujours manger en premier, et j'ai mis des années à comprendre qu'elle le faisait pour s'assurer que j'aie le ventre bien rempli avant d'attaquer sa part.En effet, l'auteur nous propose une analyse fouillée des affres d'adolescent particuliers confrontés à des adultes plutôt pusillanimes et instables psychologiquement. Et, ces adolescents s'en tirent plutôt bien.”
L'auteur parvient à toucher ce qui constitue à la fois le sel, le danger et le bonheur d'être adolescent en donnant la parole aux différents personnages. Ce faisant elle renvoie le lecteur à se propre adolescence et au toujours problématique passage vers l'âge adulte.
Donnons le dernier mot à Abby : « Parfois, j'ai l'impression que ces deux tours tombent encore, et qu'elles ne cesseront jamais de tomber. »
Un livre émouvant.
Lien : https://camalonga.wordpress...
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