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Critique de benifabs


Ce roman qui m'a été offert par une amie d'origine Italienne m'était totalement inconnu. Au mieux le nom de l'auteur sonnait à mon oreille. Mais il se trouve que j'ai beaucoup d'affinités avec cette amie et que, dans sa dédicace, j'ai appris que c'était un de ses auteurs italien préférés. Cela suffisait pour que je porte un regard particulier à cette lecture. Je peux vous dire tout de suite que ce roman ne peut vous laisser indifférent.
C'est une parabole du temps qui passe comme je n'ai jamais eu l'occasion d'en rencontrer. Une intervention de François Mitterrand au sujet de la lecture de ce livre dans l'émission Apostrophes en fait aussi une référence littéraire.
L'histoire somme toute simple d'un jeune militaire affecté dans un fort va nous décrire de façon magistrale ce que beaucoup d'êtres humains font dans leur vie : Attendre.
D'un séjour qui ne devait être que de quatre mois, ce militaire en fera toute sa carrière. Son personnage est abstrait nous n'aurons aucune description physique mais seulement une approche psychologique. A chaque fois qu'il voudra retourner à la ville, les circonstances l'en empêcheront, et même souvent c'est lui qui n'aura pas le courage de changer sa vie et ses habitudes. le mot est dit, « habitude », car il s'agit bien de cet état qui fait que beaucoup d'êtres humains ne font pas ce qu'ils avaient rêvés de leur vie. Drogo le lieutenant va attendre et oublier de vivre la vie qu'il avait envisagée.
Quant à l'occasion d'une permission quatre ans après il revient chez sa mère, il est rapidement déçu par la ville, ses amis ; son amie lui parait lointaine et indifférente. Ni lui, ni elle n'auront la volonté de se rapprocher, le temps a gommé leur amour. Alors, il fuit la ville pour retrouver ses habitudes.
Il est vrai que le thème de la vie militaire avec les différentes périodes pour avancer dans leur carrière est bien choisi, mais cela pourrait s'adapter à d'autres situations professionnelles.
Une comparaison est faite entre la vie qui passe pour les hommes et la même vie dans la nature des arbres qui même coupés continue de travailler et « les boiseries les plus anciennes, laissaient entendre des craquements dans l'obscurité……..c'est l'époque ou un regret tenace de la vie ressuscite chez les vieilles planches ». (Page 166)
Les officiers, usés par le temps et l'inactivité ne savent plus prendre de décision.
« Les aiguilles de la pendule approchaient de la demie de dix heures quand le commandant Matti entra dans la pièce, pour rappeler au colonel que c'était l'heure du rapport des officiers. Filimore l'avait oublié et il en fût désagréablement surpris : il allait être obligé de parler des étrangers qui étaient apparus dans la plaine, il n'allait plus pouvoir remettre de prendre une décision, il allait falloir les déclarer officiellement ennemis ou bien plaisanter à leur sujet, ou bien encore choisir un moyen terme, ordonner des mesures de sécurité et en même temps se montrer sceptique, comme s'il n'y avait pas à se monter la tête. Mais il fallait, coûte que coûte prendre une décision, et cela lui déplaisait. » (Page 132)
Le temps qui au début n'était qu'une notion administrative prend une autre tournure au fil des années pour se rendre compte un jour que sa vie est passée. A force de vouloir guetter la possible venue d'ennemie avec des jumelles on se retrouve à voir sa vie dans un rétroviseur.
Le style est simple, limpide, poétique. L'homme dans sa difficulté face au temps qui passe dans un monde qui, lui aussi, passe en écrasant de son poids les vies. Drogo lui aussi n'arrivera pas à modifier le cours de sa vie, comme le fera certainement ce jeune Lieutenant Moro qu'il rencontrera lors d'un retour, au même endroit où il avait rencontré un ancien, le capitaine Ortiz sur le chemin au premier jour de son arrivée trente ans auparavant (Page 230). La vie est un éternel recommencement, comme au cinéma lors des reprises, il n'y a que les acteurs qui changent.
A la moitié du livre on se pose la question : quel est le sens que prend la vie de Drogo ? Par moment on peut avoir envie qu'il réagisse et retourne vers la ville, cela en est même frustrant car cela peut nous mettre devant nos frustrations personnelles.
On ne peut que constater l'irréversibilité de la vie et un sentiment de frustration pour Drogo qui malade est mis dans l'obligation de quitter le fort au moment même où l'attente de sa vie aurait pu être récompensée. Mais il est trop tard le temps a fait son oeuvre. A la fin Drogo comprendra que l'ennemi qu'il a attendu des années durant, dans ce fort, est la mort qui vient le chercher.
Un livre à lire et même relire car pour nous aussi le temps passe……..En attendant il ne me reste plus qu'à voir le film tiré de cette oeuvre interprété par Jacques Perrin !
Habituellement lorsque j'apprécie l'écriture je relève de nombreuses citations, pour ce roman je ne l'ai pas fait car elles seraient beaucoup trop longues. En résumé ce roman en entier est une très belle citation sur le temps qui passe et doit nous inciter à vivre le moment présent.
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