AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Apoapo


Cet essai très court et très vulgarisateur a pour but de rediriger vers des bases plus informées les craintes que le grand public ressent à l'égard des algorithmes et des masses de données privées stockées et traitées par voie informatique : les big data. Il est intéressant de noter que ces craintes sont de deux natures contradictoires : d'une part, en redoutant un excès de puissance et de rationalité des nouveaux moyens de calcul, l'on est effrayé par un contrôle totalitaire de l'individu, d'autre part, l'on « s'indigne[...] qu'Internet permette aux idées extrémistes, aux thèses conspirationnistes et aux prêches fondamentalistes de rencontrer un public sur le réseau » (p. 101).
Une critique politique bien fondée devrait partir de l'usage déjà présentement fait et détourné des statistiques et du quantitatif comme fondement de l'évaluation notamment des politiques publiques ainsi que de tant d'autres domaines de notre quotidien ; elle devrait aussi saisir la circonstance préalable que les algorithmes opèrent, actuellement encore, selon quatre modes coexistant et divergeant de classification de l'information numérique : la popularité, l'autorité, la réputation et la prédiction. Ces quatre modes (illustrés au ch. Ier) sont à la fois responsables d'erreurs interprétatives et contestables quant aux valeurs politiques et au type de société qui les sous-tendent et qu'ils promeuvent. Les trois ch. suivants : ch. 2 « La révolution dans les calculs », ch. 3 « Les signaux et les traces », ch. 4 « La société des calculs », sont consacrés globalement à développer en parallèle ces deux ordres de critiques. Bien que l'essai se proclame sociologique et visant à une critique politique, le technicisme du sujet que ne sait dissiper un propos trop succinct empêche une prise de distance suffisante à l'analyse sociologique ; de ce fait, à part quelques aperçus exemplaires et pratiques, la démonstration reste incomplète, ne serait-ce sur la question de savoir la puissance réelle de ces calculs et la validité de leur postulat (philosophique) comportementaliste radical. La métaphore des « rêves » des algorithmes contenue dans le titre, n'est pas non plus suffisamment argumentée.
Les algorithmes sont-ils redoutables ou à peine efficaces dans le marketing ? Seront-ils effectivement effrayants dès que techniquement plus sophistiqués, ou bien leurs limites sont-elles pour ainsi dire ontologiques ? Une intervention législative – à supposer qu'on parvienne à en déterminer les finalités juridiques – peut-elle advenir autrement qu'ex post, quand les « dégâts » sont déjà faits ? Jusqu'à quel point leur opacité – technologique, commerciale – est remédiable sans que la divulgation du fonctionnement (et des buts) n'entraîne la truandise des acteurs qui possèdent leurs propres intérêts à modifier des données qui sont devenues les ressources économiques d'une nouvelle industrie – à l'instar des hydrocarbures dans la précédente révolution industrielle ?
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}