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Critique de dogasquet


Grégoire Carle s'est inspiré de l'histoire réelle de son grand-père : un très jeune résistant alsacien du groupe « la feuille de lierre », opposé à l'araignée allemande, sournoise et prédatrice.

Été 1995 – Un enfant pèche la truite avec son grand-père. Paysages sublimes de nature, de rivière. Une bulle de beauté aux coloris lumineux, aux traits précis et travaillés.
Tous les deux sont des pécheurs passionnés : « Ma canne oscille d'un battement régulier. Une énergie fluide circule de mes reins jusqu'à la soie et propulse cette minuscule mouche sur la rive opposée...Mais la truite n'en veut pas !
Je dois encore apprendre à lire la rivière, ce livre écrit dans une langue secrète et dont le courant tourne les pages »

Au fil de l'eau comme au fil des souvenirs….
Pépé se souvient : 1er septembre 1939, l'évacuation de Strasbourg - vidé de 200. 000 habitants
Le contraste est marqué graphiquement entre la paix, la fluidité de la rivière et les souvenirs du vieil homme à Strasbourg. Un fond toujours clair mais personnages sombres.

22 juin 1940 – l'armistice et le retour des alsaciens qui ont fui le conflit. Un seul objectif pour les occupants : rendre les alsaciens, allemands, à tout prix. « Mais si, en dépit du rouleau compresseur de l'appareil nazi, survivait une étincelle de rébellion, alors le Gauleiter disposait d'un outil particulier. Un camp de rééducation des récalcitrants.
Ce camp fonctionnait comme un organe de propagande.
On y « reprogrammait » les rebelles à coup de travaux forcés, de jeûnes et de châtiments corporels. Au bout de quelques mois, les prisonniers étaient relâchés et leur aspect fantomatique suffisait à dissuader quiconque de braver les autorités allemandes. »

Une situation complexe et douloureuse pour cette région, écartelée entre deux pays, familière aux habitants, dès 1870, puis 1918 et maintenant en 1940. Chacun veut rendre allemands ou français cette population d'Alsace / Moselle. Qu'il s'agisse de l'Allemagne nazie mais aussi de la France, la situation des alsaciens et mosellans a toujours été difficile.
« Quand Clemenceau et Poincaré sont arrivés à Strasbourg, ils ont refusé de recevoir les élus du Conseil, pire, ils ont mis en place l'épuration ethnique.
L'Alsace et la Moselle ont été les seuls territoires de France métropolitaine où l'état appliqua la loi du sang, comme dans son empire colonial…
Certes les allemands font pareil, mais eux ne se réclament pas des Lumières. »
Beaucoup d'alsaciens se sont alors davantage tournés et reconnus dans le communisme.

Le sentiment de ne jamais être à sa place. Trop français pour les allemands et trop allemands pour les français.

Les jeunes alsaciens, dont le grand père de Grégoire Carle, travaillent à l'usine de constructions mécaniques ( SACM) qui fournit l'armée allemande. C'est encore des ados, 15, 16 ans et ils adorent pécher. Pour manger, vendre leur poisson, mais aussi se retrouver loin des oreilles indiscrètes.
Ils trouvent un fort de défense, abandonné à la hâte par les soldats français en 40 et bourré de munitions : « Il est hors de question que ces armes aillent dans les mains des boches. »

La résistance s'organise alors avec le sabotage des lignes électriques, les tracts antinazis et l'aide aux prisonniers de guerre français évadés des camps allemands. Y compris les sabotages des pièces dans la SACM.
Ils constituent un groupe « la feuille de lierre ». Un nom chargé de sens : « toujours vert, toujours fidèle ».

Ils seront arrêtés et envoyés au camp de travail de Schirmeck : « Ce jour-là les nazis ont tabassé et torturé 14 gamins de 15 ans sans réussir à leur arracher le moindre aveu. »

J'ai particulièrement apprécié cette histoire quotidienne, au plus proche des habitants. Une BD richement documentée, foisonnante de détails précis, ceux du quotidien des alsaciens et mosellans.

J'ai simplement regretté quelques longueurs, et l'anonymat relatif des personnages. Difficile de différencier les jeunes résistants les uns des autres, et je n'ai pas reconnu, parmi eux, qui était le grand-père de l'auteur…

Cela n'empêche, c'est une BD passionnante et magnifiquement dessinée.

Merci à Netgalley et aux Editions Dupuis de m'avoir permis de découvrir ce groupe de résistants, très jeunes, de « la feuille de lierre. »

Lien : https://commelaplume.blogspo..
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