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Critique de elodiedupuis


Cette critique est susceptible d'être biaisée. Babelio ne garantit pas son authenticité

En tant que femme asperger (ou personne asperger tout court), je devrais me reconnaître dans l'histoire scénarisée par Mme Dachez et illustrée (de façon médiocre) par Mlle Caroline. Ce n'est pas le cas. Bien au contraire.

Au titre, on peut voir la première erreur: "La différence invisible". le syndrome d'Asperger n'est pas "invisible"; il est peut-être moins remarquable que d'autres handicaps (notez que j'ai bien utilisé le mot handicap), mais il n'est en rien invisible. Il est impossible de masquer parfaitement. D'ailleurs, le personnage de Marguerite, censé être une représentation du syndrome, est bien décrite comme "décalée" par son entourage.

La lecture de cet ouvrage m'a laissée l'impression amère d'avoir lu une description vague et superficielle du syndrome, voire carrément erronée et contradictoire dans certains passages.
La manière typique de s'exprimer des aspies n'y est pas (tout comme dans les entrevues de Mme Dachez, où les commentaires sont bien souvent désactivés).
Bien qu'instinctivement, les aspies ont parfois du mal à entendre doubles sens et ironie, avec une exposition suffisante, on finit par ne plus se fier à nos intuitions et à réfléchir à toute expression absurde en termes physiques, sans parler de celles que l'on apprend tout bonnement à l'école, en cours de français, ou en consommant des oeuvres culturelles. La scène du "parler chiffons" est juste ridicule, surtout pour une jeune femme de vingt-sept ans présentée comme "intelligente" (en y regardant de plus près, il y a de quoi avoir des doutes). Tout comme la scène où, adolescente, elle croit les premières filles qui se présentent à elle, qui lui disent que tel garçon l'aime bien (c'est simplement de l'idiotie à ce point là). Mais il faudrait être aveugle pour ne pas se rendre compte que Mme Dachez n'a pas trop de difficultés pour se montrer en public, tout en portant des accessoires attirant l'attention, ou avec un accoutrement que même la plupart des femmes neurotypiques n'oseraient pas porter à l'antenne par pudeur.

L'hypersensibilité est elle aussi mal représentée. Bien que les autistes soient plus sensibles que la moyenne, l'hypersensibilité dite autistique va se caractériser par l'intolérance à des bruits et autres stimulus bien spécifiques que la majorité des humains supportent. Qui a du mal à travailler en open-space? Qui trouve insupportable les bruits de chantier? Tout le monde.
Le fait qu'elle fasse une crise de panique (je ne sais pas comment nommer ces crises liées à l'autisme) dû à un environnement auquel elle est exposée quotidiennement (son lieu de travail) sans contexte, et que cela passe après une petite pause, dans un endroit isolé, relève de l'insulte.

L'intérêt restreint, survolé dans le livre, qui est présenté comme une passion, et non comme une obsession, correspond tout simplement à une appartenance à l'idéologie végétalienne.

le plus dérangeant dans cette bande-dessinée est la représentation du monde vu par Marguerite. Il y a clairement une volonté de contraste. Les femmes sont toujours en talons aiguilles, en robes chic, bien mises sur elles, alors que Marguerite s'habille comme "une ado attardée", c'est-à-dire... comme la majorité lorsqu'il n'y a pas de code vestimentaire. C'est apparemment une aberration d'être introverti, ou d'être fatigué le vendredi soir et de ne pas désirer sortir... Les proches de Marguerite se comportent comme des collégiens mesquins. Je ne suis pas sûre de savoir dans quel monde vit Marguerite.

Les relations avec son compagnon et ses amis sont représentées superficiellement, alors que c'est un point majeur dans le comportement d'une personne asperger. Aucune mention de ses parents (rares sont les personnes asperger complètement indépendantes, et le soutien parental est crucial pour même prétendre y arriver un jour).

Les examens du CRA correspondent à un test de capacités cognitives (en quelque sorte d'intelligence, de QI) et de capacités psychomotrices. Quant aux questions personnelles, elles sont très précises; on ne demandera jamais "Quelles sont vos expériences passées?". Aucun test de la reconnaissance du langage non verbal.

En analysant son expérience, ou les expériences des autres personnes asperger qu'elle montre, on peut en déduire que Mme Dachez confond asociabilité, introversion, agoraphobie, anxiété sociale, anxiété et syndrome d'Asperger. Il y a énormément de contradictions dans sa représentation du syndrome d'Asperger. A vrai dire, après analyse de toutes les oeuvres de Mme Dachez, je remets en cause son diagnostic. Elle me semble juste être une petite bourgeoise introvertie et anxieuse, qui essaye de se rendre spéciale par tous les moyens possibles et imaginables, et surtout, de gagner des points de victimisation.

Je déconseille fortement ce livre, et tout particulièrement pour renseigner des gens neurotypiques pour lesquels le syndrome d'Asperger est une nouveauté.
Anecdote: j'ai montré le livre à plusieurs membres de ma famille. Sans aller aussi profondément que moi dans l'analyse de l'ouvrage, ils remarquent, eux aussi, les erreurs de représentation les plus aberrantes.
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