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Critique de Moglug


Moglug
23 décembre 2015
Je m'étonne qu'on ne l'ai pas encore nobellisé. Orbitor correspond à ma deuxième rencontre avec Mircea Cărtărescu et j'en reste coite, tétanisée, abasourdie de la multitude de mondes avalés ces quinze derniers jours en quelques centaines de pages.

J'avais adoré le recueil de nouvelles Pourquoi nous aimons les femmes, et j'espérais bien ne pas être déçue par ce premier volet de la fameuse trilogie de l'auteur. Dans un tout autre registre, et dans une langue on ne peut plus élaborée, Mircea Cărtărescu entraîne son lecteur dans les méandres de son enfance, de ses souvenirs, de ceux de sa mère, dans ses rêves, dans la Bucarest bombardée sous le régime nazi. La femme, à nouveau, et malgré le foisonnement de sujets abordés, reste au centre du récit, la mère, la naissance, la jeunesse, l'avant sa naissance. le sexe, l'horreur, la mort, la guerre, la torture sont décrites dans une langue quasi baudelairienne, les images insoutenables tiennent le lecteur en haleine par la seule beauté de l'écriture ; souvent jusqu'à perdre le lecteur impatient qui voudrait s'acharner à comprendre. Pour lire Mircea Cărtărescu, le lâcher prise s'impose. D'emblée, il faut accepter de ne pas tout comprendre, se laisser porter par le seul rythme des phrases pourrait suffire en soi. L'auteur navigue d'un siècle à l'autre, d'un pays à l'autre, pour revenir le plus souvent à Bucarest, parfois pour partir dans des univers totalement fantasques, prétextes pour dérouler les obsessions morbides et vivaces, mortelles et vivifiantes, improbable panaché d'images alliant le pire au meilleur, le sublime à l'abominable. Je ne sais comment vous décrire autrement cet incroyable et ingénieux récit, ce conglomérat d'histoires dont l'auteur seul maîtrise la logique, totalement décousu en apparence et étrangement cohérent.

Je me dois nécessairement au passage de saluer les prouesses du traducteur Alain Paruit pour avoir oser relever avec brio le défi de traduire ce monument de la littérature roumaine. Tout de même, je me dois de vous avertir, Orbitor n'est pas facile d'accès, j'ai voulu le lire précipitamment en cette fin d'année pour boucler le challenge variétés… Orbitor ne se prête pas à la lecture rapide, il impose le temps long, il nécessite de déguster, et de digérer chaque paragraphe. La richesse du vocabulaire m'a plus d'une fois laissée pantoise. Si je n'ai pas osé m'interrompre pour prendre un dictionnaire, si j'ai préféré laisser libre cours aux sonorités, j'ai dû plus d'une fois m'affranchir du sens des phrases et renoncer purement et simplement à la compréhension formelle du texte. Parfois avec lassitude, le plus souvent avec stupéfaction devant cet engrangement de maitrise littéraire.

Orbitor ne se résume pas pour autant à un exercice de style, la profondeur des propos de l'auteur est bien au rendez-vous, hallucinante de folie, de douleur, de chair et d'humanité.
Lien : https://synchroniciteetseren..
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