Rien, personne. Le vide... Même sur les cartes. L’endroit n’a pas de nom, d’ailleurs. Speranza, c’est moi qui l’appelle comme ça. C’est mon invention. Je suis le premier, le seul. L’horreur. À se demander si j’existe vraiment...
Ça y est ! Sauvé ! Il se dirige vers l’île.
Je le vois avancer lentement dans la baie, ralentir, carguer ses voiles. Des silhouettes agitées sur le pont, dans les agrès, caméléons, fourmis.
Une chaloupe est mise à l’eau. Ça ne traîne pas, quelques coups de rames, sifflets, yo ! ho ! ho !
Les marins mettent pied à terre.
Alors j’abandonne tout ! Feu, fierté, le reste... Je dévale la pente comme un dératé en me déchirant les pieds sur les ronces et les cailloux jusqu’à la plage et là je me jette à leurs genoux, les larmes aux yeux, je me traîne à terre, j’embrasse leurs bottes, j’implore, chiale, morve, j’ai du sable plein la figure, du vinaigre dans les yeux, des crabes dans la bouche...
Rien, pas même un bout de cuir où planter les dents. Le ciel blanc comme du plomb fondu. Je m’effondre comme une loque. Vidé, anéanti...