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Critique de JIEMDE


Une fois de plus, je suis époustouflé par la capacité de Sorj Chalandon à changer de registre d'un livre à l'autre, tout en gardant cette écriture simple, juste, touchante et sensible, que j'apprécie particulièrement.

Profession du père n'échappe pas à cette règle. Aux frontières de l'autobiographie, Chalandon nous relate son enfance, dans les années 60, sur fond d'Algérie française, de haine gaulliste et d'OAS. Émile traverse cette période dans l'ombre d'un père névrosé, affabulateur, qui rêve sa vie autant qu'il l'invente, chaque jour, à chaque instant, se nourrissant de chaque nouvelle information entendue pour la faire sienne. Une vie de papier qu'il impose à son fils qui, à 10 ans, se voit devenir agent secret, membre de la CIA comme de l'OAS, se préparant dans le plus grand secret à participer à l'assassinat de De Gaulle. Un monde de rêve pour un gamin justifiant toutes les incohérences de son père par la vénération qu'il lui porte.

Mais la névrose a son revers : la violence, l'injustice, les coups, l'impossibilité de témoigner de la moindre marque d'amour filial. Et dans son malheur, Émile ne peut compter sur sa mère, spectatrice affligée mais quasi-impassible de la détresse de son enfant. Et qui ira plus tard jusqu'à participer à son "abandon" (la scène du déménagement...).

Et puis adulte, la difficulté de comprendre, les tentatives de "vivre avec", une forme d'amour toujours présente. Car ce qui est incroyable dans ce texte, dans ces mots toujours à fleur de peau, c'est que du début à la fin, l'amour filial ne cesse d'être présent. Certes, pas le classique amour d'un fils envers ses parents. Non. Autre chose. Différent. Forgé dans l'incompréhension. Dans la douleur. Mais aussi dans l'espoir.

L'espoir que malgré tout, il n'est jamais trop tard. Que jusqu'au bout, il faut essayer de maintenir ce lien. Même insuffisamment partagé. Même sans retour. Et petit à petit, "réparer son propre tableau". Pour se construire et avancer.
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