Citations sur Philip Marlowe : The Long Goodbye (Sur un air de Nava.. (57)
The French have a phrase for it. The bastards have a phrase for everything and they are always right. To say goodbye is to die a little.
- T'es drôlement verni, Marlowe. Deux fois de suite, tu t'en tires de justesse. Tu finiras par tourner mal. Tu t'es échiné pour ces gens-là et tu n'en as pas tiré un sou. Tu t'es aussi échiné pour un nommé Lennox, si je ne me trompe et ça ne t'a rien rapporté non plus. Comment fais-tu pour gagner ton bifteck ? T'as fait assez d'économies pour vivre de tes rentes ?
Je me levai et me plantai en face de lui.
- Je suis un romantique, Bernie. J'entends des voix qui pleurent la nuit, et je ne peux pas m'empêcher d'aller voir ce qui se passe.
J'étais en train de grimper le perron quand ils se décidèrent à sortir pour m'interpeller. C'était le tandem classique, les deux mirontons fagotés comme toujours, avec cette inévitable souplesse de robot et cet air de croire le monde entier suspendu à leurs lèvres, dans l'attente de leurs directives.
-C'est vous Marlowe ? On a deux mots à vous dire.
Tous deux avaient des yeux patients, précis, attentifs, froids, méprisants, des yeux de flics. Ils les avaient récoltés pendant leur stage préparatoire.
Je possède des journaux, mais je ne les aime pas. Je les considère comme une menace permanente pour le peu qui nous reste de vie privée. Leurs constantes récriminations en faveur d’une presse libre signifient, quelques honorables exceptions mises à part, la liberté de tripatouiller dans les scandales, les crimes, la haine, la diffamation, le sexe, etc. Un journal est une affaire qui rapporte grâce à sa publicité. Je n’ai pas à vous apprendre ce qui assure les gros tirages.
- Le crime organisé n'est que le côté malpropre du dollar roi.
- Et le côté propre?
- Je ne l'ai jamais vu.
Nous sortîmes dans la lassitude du soir ; il voulait marcher, me dit-il. Nous étions venus dans ma voiture et, pour une fois, j'avais réussi à payer l'addition. Je le regardais s'éloigner. La lumière d'une vitrine s'accrocha dans ses soyeux cheveux blancs et il disparut dans le brouillard ténu du soir. Je le préférais encore saoul, au bout de son rouleau, affamé, mais avec une étincelle de fierté. Ou peut-être était-ce moi qui préférais après tout jouer les saint-bernard ?
Il m'aurait raconté toute sa vie si je le lui avais demandé. Mais je ne cherchais même pas à savoir comment il avait été défiguré. Si je lui avais posé la question et s'il m'avait répondu, deux vies auraient peut-être pu être sauvées.
Les Français ont une expression pour ça. Ces salauds-là ont toujours le mot de la situation. "Partir, c'est mourir un peu."
Là-bas, dans la nuit des mille et un crimes, des êtres humains meurent, sont mutilés, déchiquetés par des éclats de verre, écrasés contre des volants ou sous de larges pneus. Des êtres humains sont battus, volés, étranglés, violés, assassinés. Des êtres humains sont affamés, malades, rongés d'ennui, de solitude, de remords ou de crainte, cruels, fébriles, secoués de sanglots. Une ville qui n'est pas pire que les autres, une ville riche, vigoureuse et fière, une ville perdue, éclopée, vide.
Tout dépend de la place que vous occupez, du standing auquel vous pouvez prétendre.
D’un autre côté, j’avais envie de me défiler pour ne pas revenir mais ça, c’était la voix que je n’écoutais jamais. Parce que si c’avait été le cas, je n’aurais pas bougé de la ville où j’étais né, j’y aurais travaillé à la quincaillerie, aurais épousé la fille du patron, fait cinq gosses, aurais lu les bandes dessinées du journal du dimanche matin, calotté les mômes s’ils faisaient des bêtises, discuté avec mon épouse du montant de leur argent de poche et des programmes qu’ils pouvaient écouter ou regarder à la radio et à la télé. Je serais peut-être même devenu riche – riche pour un trou en province -, avec une maison de huit pièces, deux voitures au garage, du poulet tous les dimanches, le Reader’s Digest sur la table du salon, la femme avec une permanente en fonte et moi avec une cervelle comme un sac de ciment. Allez-y, les amis. Moi, je choisis la grande ville, sordide, sale, pourrie.