Elle avait aimé ces moments. Rien qu'elle et sa fille.
Elle avait même interdit les visites pour quelques temps.
Tout comme elle le fait aujourd'hui pour ne pas fatiguer Judith davantage. Peut-être aussi pour profiter de ces instants.
Pour la première fois, elle peut dire… Elle peut lui dire que Judith va partir. Qu’elle voudrait savoir quand. Que ces incertitudes la rongent. Qu’elle ne veut pas de cette mort-là. Que sans sa fille, elle n’est rien. Qu’elle ne sait même pas s’il est possible de survivre sans son enfant. Qu’elle ne veut pas de cette question. Qu’elle veut encore moins y répondre.
A l’autre bout du fil, Théo ne parle pas.
Il l’écoute seulement.
Il n'y a pas de mots dans la langue française pour désigner un parent qui perd son enfant.
Pas de mots pour consoler.
Elle ne veut pas être consolée.
Elle s'accroche à ces gestes répétés devant les casseroles. Elle cuisine. Bientôt l'heure des visites.
Tout est cuit.
Judith garde les yeux fermés, ne réagit pas au baiser de sa mère, pas plus qu'à sa proposition de sortie.
Rien de plus que : « C'est toi qui sais. »
Mais Florence n'attendait pas d'autre réponse. Elle a toujours su ce qu'il y a de meilleur pour sa fille. Elle a toujours été de bon conseil. Depuis le premier jour, elle ne pense qu'à une chose, faire pour le mieux. Elle a mis un à un ses sentiments de côté pour pouvoir se rendre entièrement disponible.