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Critique de Cigale17


« J'oublie des choses, j'en recrée. Je ne sais plus exactement comment se sont déroulées ces premières heures, à Malvoisie. Malvoisie, ma maison. » Dès les premières phrases, la narratrice, une écrivaine, la petite cinquantaine, nous apprend qu'elle a hérité cette belle et grande bâtisse d'un amant et amour de jeunesse qui lui a aussi légué suffisamment d'argent pour entretenir la propriété. Elle quitte donc son loft parisien avec plaisir et s'installe en Bourgogne. Antoine, 70 ans, s'occupe de l'entretien courant de Malvoisie, du verger, du potager, des rosiers, comme il le faisait déjà pour l'ancien propriétaire. Va-t-elle le garder ? Elle hésite : il pourrait se montrer envahissant, la déranger… Ils trouvent facilement un arrangement qui leur convient à tous les deux et, au fil du temps et des confidences, ils vont apprendre à se connaître.
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D'emblée, un regret : le bandeau qui annonce « La délicatesse d'un assassin » alors que le lecteur n'apprendra le crime d'Antoine qu'à la page 123. J'aurais aimé qu'on me laisse découvrir par moi-même l'enchaînement des faits… Cette pratique éditoriale devient la norme et je le regrette. Comme le laisse présager l'incipit, la mémoire, ses manques, la modification et la transformation du souvenir occupent une place importante dans les récits des traumatismes des personnages principaux. J'ai du mal à parler de la structure du roman sans en dire trop sur l'intrigue et l'évolution des personnages tant ces aspects sont imbriqués. Saskia prévient Antoine : ce qu'il lui confiera pourra faire l'objet d'un roman, loin ou près de la réalité des faits, et Antoine donne son accord à la romancière. Christian Chavassieux nous propose donc d'accompagner une écrivaine et de partager les fruits de son travail, ses interrogations, son introspection, sa progression, ses réticences, bref une réflexion métalittéraire soignée, mais qui n'affaiblit pas la force du récit. La démarche prend tout son sens quand on lit les remerciements. J'ai été sensible aux progressives confidences d'Antoine à la narratrice, récit parfois hésitant, parfois naturel, qui dévoile un homme sensible et tourmenté, à mille lieues de la figure du paysan bâtie par les préjugés de la Parisienne : « Qu'est-ce qu'une histoire comme ça a à voir avec le malheur ? » J'ai suivi avec compassion la sincère et douloureuse introspection de la narratrice dont on apprendra le prénom dans un moment bouleversant. Je me suis interrogée sur le rôle d'exutoire qu'elle attribue à l'écriture et j'ai apprécié le souci qu'elle avait de son interlocuteur, sa crainte de se comporter égoïstement et de privilégier son travail au détriment des sentiments d'Antoine. J'ai aimé côtoyer ces deux personnalités complexes et attachantes. Et puis comme toujours, il y a l'écriture de Christian Chavassieux, le mot inattendu mais juste, l'écho poétique, le rythme… Bref, j'ai beaucoup aimé ce Très cher cueilleur de roses.
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