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Critique de Aderu


Aderu
28 septembre 2020
Avant tout merci à Babelio et aux éditions ThoT pour ce livre reçu dans le cadre de la Masse critique littérature.
J'avais envie de le lire, suite à une lecture en diagonale de l'enthousiaste critique d'Actualitté. Aussi l'ai-je coché sans hésitations dans la liste proposée pour cette masse critique.
Bon, vous voyez ma note, alors allons-y.

Le roman se lit rapidement, seulement ralenti par instant par la proximité des noms des héroïnes (Marie, Maria, Marina, Mariam). Ce n'est pas un point négatif, juste un constat personnel. Je trouve même cette idée onomastique intéressante (sans être révolutionnaire).
C'est un roman à message(s) qui se veut une plongée française au Mali (vu la nationalité de la majorité des protagonistes).
Mireille Clapot expose la difficile condition des femmes, tant au Mali, qu'en France et même en Roumanie.
La sororité revendiquée et mise en avant au fil des pages constitue un important pilier de ce roman.

Ceci étant dit, j'ai envie de rappeler cet adage bien connu : l'enfer est pavé de bonnes intentions.

Il y a dans les premières pages des formulations pour le moins offensives à l'encontre des Malien.ne.s. On se dit que c'est en rapport avec l'état d'esprit de l'héroïne de la scène, en proie à une grande colère. Certes les invectives ne survivent pas, mais une curieuse saveur traverse tout le livre.
Citons un étonnant vocabulaire pour parler de l'IVG : broyage, destruction. Surtout dans un livre revendiqué comme féministe et posé dans la bouche ou la tête d'une gynécologue militante, cela interroge.
Autre chose : l'homme noir ce prédateur insatiable. Si à la fin de la lecture, l'on a pas compris que le Malien est obsédé par le sexe, c'est qu'on a sûrement pas bien lu.
Les Africains ces lents, ces nonchalants. Là c'est une constante. Quelle indolence chez ces gens pardi ! Je n'ai pas fait les comptes, mais je serai prêt à parier qu'à chacun des dix premiers chapitres (sur douze) cette idée revient. D'ici à ressortir la fumeuse "théorie des climats" de Montesquieu, il n'y a qu'un pas.
Autre problème, il faut attendre le dernier tiers du livre pour que le bambara accède au statut de langue. Avant cela, c'est un parler, puis un dialecte. On pensera à la formule du sociolinguiste Philippe Blanchet, résumant une facette des discriminations liées aux langues : "les paysans parlent du patois, les Africains du dialecte". Par chance, à la troisième tentative de Mireille Clapot, la "langue" apparaît.
Il y aurait sûrement d'autres points à soulever (comme cette mention du manque d'éducation artistique des témoins d'une scène).

La narration n'est pas très prenante et les dialogues sont souvent gênants d'irrealisme (particulièrement dans les deux premiers chapitres, mais c'est un fil rouge qui ne se dément pas jusqu'à la fin).
Que l'autrice veuille faire passer un message (ou plusieurs) ne me dérange pas en soit, mais pas au prix d'un sacrifice de littérature. Comme ce mail sortit de nulle part au début du chapitre 10, qui a pour but de faire passer une idée, certes, mais l'on ne sait pas d'où il sort, à qui il a été écrit, etc. Cest juste le support d'un commentaire, lâché comme ça en fin de paragraphe.
C'est ce qui pose problème aussi avec les dialogues où des tirades sont là pour expliquer au lecteur ou à la lectrice telle ou telle chose, mais qui sonnent faux, tant dans les bouches qui les prononcent que dans les oreilles (et plus encore dans ces oreilles) qui les reçoivent. Faire transmettre ces détails ou informations par la narration auraient permis d'atténuer l'aspect en "toc" de certains échanges.

Je n'ai pas du tout aimé la fin, la dimension mystique me laissant pour le moins sceptique. Les explications du chapitre 11 sont un peu lourdes.
Si la rencontre de ces 4 profils de femmes aurait pu accoucher d'une histoire intéressante, je n'adhère pas du tout au choix de Mireille Clapot d'en faire le fruit d'un projet les dépassant. Nulle doute que d'autres s'en satisferont, mais c'est ici ma critique.
Dernier point, le retournement de situation que je ne dévoilerai pas. Franchement, il y a des gens qui ne le comprennent qu'au moment où il est verbalisé ? Sa vraisemblance demande par ailleurs une suspension de crédulité beaucoup trop importante pour moi. La ficelle est trop grosse et pas crédible à mes yeux.

J'ai plus l'impression d'un roman pour ados, tant certaines situations me semblent caricaturales. Mais pas un roman que je recommanderai à un.e ado.

Si je n'ai pas vraiment de doute sur la bonne volonté de l'autrice de dénoncer la condition des femmes au Mali (et au-delà), je trouve l'exercice raté.
Mireille Clapot s'excuse, là encore sans que l'on puisse douter de sa bonne foi, à la fin de ses remerciements si la lecture heurte. Prophétique ?
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