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Critique de LaGeekosophe


Plus de 1100 pages pour ce livre qui mérite bien le nom de pavé ! Jonathan Strange et Mr Norrell est un roman ambitieux qui aime donner beaucoup de détails pour installer son univers. Au menu : magie, homme-fées et sortilèges sur fond de guerres Napoléoniennes.

Nous avons affaire à une oeuvre singulière, que ce soit par sa longueur que par son style. Susanna Clarke prend plaisir à avoir un style badin, détaillé et croquant. La plume croustille et virevolte pour construire cette ambiance propre à l'Angleterre : joyeux mélange d'excentricité douce et de balai dans le fondement (n'est-il pas ?). Elle rend honneur aux paysages sauvages et humides anglais, ce qui rend certains passages très visuels. le style m'a beaucoup rappelé J.K. Rowling, entre légèreté, détails et digressions.

Autre spécificité narrative : il y a vraiment beaucoup de notes de bas de page. Je sais que cela rebute certains lecteurs. Les notes de bas de page servent à l'autrice à raconter de petites histoires magiques, des anecdotes sur les personnages qui n'ont pas d'incidence sur la trame principale. J'ai trouvé ces additions à l'univers souvent enrichissantes mais j'en ai quand même sauté quelques unes. le roman est déjà long et je n'étais pas toujours d'humeur à lire quelques paragraphes en plus. Mais cela ne retire rien à l'ambiance, d'autant que Susanna Clarke ajoute des références à des magiciens du monde réel au royaume de féerie qui tiennent quasiment de l'érudition.

L'autre point fort du récit se trouve dans les personnages. L'autrice oppose deux magiciens anglais, Mr Norrell et Jonathan Strange. Tous deux talentueux, l'histoire du livre raconte leur amitié et leur rivalité. Mr Norrell est du côté "balai dans le fondement" de la culture anglaise. Effacé, timoré, d'une prudence extrême et cachottier, il a pratique très rare de la magie et souhaite rester le seul Magicien anglais afin de rétablir la magie selon ses termes. Jonathan Norrell a appris la magie surtout en autodidacte. Il est direct, charmeur et aventureux dans sa pratique des sortilèges.

Outre le duo principal, les personnages secondaires ne manquent pas de souffle. J'ai une préférence pour le sombre Childermass, homme de main de Norrell, aux desseins souvent mystérieux et qui pratique un peu de magie. Les dames ne sont pas en reste. Arabella Strange est loin de la cruche inconsistante et ses apparitions montrent qu'elle a bien plus de jugeote que son sympathique époux. J'aime beaucoup aussi la touchante Lady Pole, sacrifiée au nom de l'ambition, qui fait preuve de résilience dans les épreuves.

L'histoire n'est pas dénuée de questionnements profonds, au contraire ! Dans un premier temps, le roman évoque beaucoup de problématiques liées au pouvoir et à l'ambition. Faut-il utiliser la magie pour régler ses problèmes immédiats même s'il y a toujours un prix à payer que l'on ne peut pas prévoir ? A quel moment dépasse-t-on les limites ?

J'ai aussi beaucoup apprécié la question des rapports antagonistes entre les deux magiciens principaux, qui questionnent assez finement la relation de subordination maître-élève et la difficulté de maintenir des liens avec des personnalités qui sont nos opposées. Dès l'instant où Strange et Norrell se séparent, ils s'enfoncent tous les deux dans ds voies qui amènent catastrophes, bassesse et échecs. Ce qui tend à montrer que leurs caractères contraires parviennent à créer un équilibre bien plus souhaitable que des extrêmes. Une ode à l'alliance et au travail d'équipe en quelque sorte.

Jonathan Strange et Mr Norrell est un roman qui vaut la peine d'arriver au bout. L'écriture ciselée et légère de Clarke est un délice qui nous fait tourner les pages sans même nous en rendre compte. Elle aime le détail, ce qui apporte une grande précision dans son univers vaste et original. Certains trouveront peut-être u'il manque d'action parfois et qu'elle s'attarde sur des éléments anodins, mais ce sont en réalités moyens de nous écrire une lettre d'amour à l'Angleterre, à ses menus défauts comme ses qualités. Ses personnages sont vraiment attachants et très bien construits, ce qui apporte un plus à cette histoire qui se révèle finalement très humaine.

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