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Critique de nadejda


Une jeune femme revient dans la maison où s'est déroulée son enfance et sa jeunesse jusqu'à son mariage. Elle vient d'hériter des biens de sa famille suite à la mort de son père. Son mari qui les gérait est également décédé.
 Elle se sent libre, «orpheline, veuve et libre.» Elle reçoit les condoléances des trois métayers qui cultivent les terres de son père. le notaire est présent qui leur dit qu'elle ne vendra pas. Ils ne verront donc pas leur vie bouleversée. Elle, dans quelques jours, après avoir tout mis en ordre et clos les volets de la maison, va s'embarquer pour l'Amérique.

Sur le bureau de son père se trouve un cahier à la couverture toilée marqué 1859 et une chemise de maroquin vert contenant des lettres. «Elle prend le tout, qu'elle lira pendant la traversée.»

Ainsi débute «Les trois saisons de la rage», hiver, printemps et été 1859. Nous allons, en quelque sorte, lire par-dessus l'épaule de cette jeune femme qui redécouvre la vie quotidienne de son père, médecin et propriétaire terrien, sillonnant la campagne normande au XIXe siècle, dans un triangle Flers, Condé-sur-Noireau, Falaise avec quelques incursions à Caen et Dives-sur-mer.
L'échange de lettres permet de découvrir le destin de Brutus délicieux fils d'un fermier de Bazoches-au-Houlme dans l'Orne, analphabète, qui va partir pour la campagne d'Italie à la place du «gars Dunant», fils lui du propriétaire des terres qui emploie la famille de Brutus, dont il a pris le numéro de conscription.
«Notre ami Brutus en prenant le numéro du gars Durant a vraiment sauvé sa famille de la ruine» p 20
Deux médecins Charles Rochambaud médecin-major, chirurgien aux armées et le docteur le Coeur sis à Rapilly village du Calvados, se chargent d'écrire et échanger les missives et de les transmettre et les lire aux intéressés.
Le journal qui constitue la seconde partie, la plus volumineuse, du roman relate la vie quotidienne du docteur le Coeur qui va de visites en visites, médicales et libertines.
p 201 «J'ai passé mon après-midi de vendredi à inspecter des vulves et des vagins, mais je n'en ai pas moins aperçu, dans l'ouverture des peignoirs, la rondeur d'un sein, le galbe d'une hanche, la proéminence d'un ventre ou d'un nombril. Plus encore, j'ai trouvé de l'enfance dans l'éclat d'une pupille, de la douceur dans le mordillement anxieux d'une lèvre. Toute une géographie émouvante s'est dévoilée à moi au coeur de ces bouges, et ce n'était pas celle du mal, non, mais cette magnifique ascension du désir que les imbéciles appellent luxure»
Le Coeur est en contact direct avec tout ce qui fait la vie de la naissance à la mort en passant par les accidents.
«J'ai vu trépasser nombre d'humains, mais jamais je ne suis parvenu à m'habituer à ce vide qui entre dans le regard.» p 158
Un médecin qui veut avant tout soulager, qui veut comprendre, améliorer mais en évitant même si elles le révoltent parfois, de heurter les superstitions et la religion. Un homme aussi, veuf, qui avait mis ses désirs entre parenthèse après la mort de sa femme, et va renouer avec le plaisir dans les bras, entre autres, de Colette à Condé-sur Noireau et Honorine sa bonne.

«Il n'est pas plus de courtisanes que de saints en ce monde. Ce ne sont tous que de pauvres êtres en quête de ce qui nous manque le plus, la certitude d'être et de pouvoir aimer.» p 199

Il fait un peu partie de la famille de ses patients dont il connait l'intimité puisqu'il les accompagne de leur naissance à leur mort et partage leurs confidences. Il doit composer avec l'abbé Bucard qui maintient dans le corset de l'obscurantisme et pense que la souffrance est rédemptrice, avec le père Duchaume de la Forêt-Auvray, guérisseur.
Ce livre est une radiographie d'une époque et d'un lieu car tous les noms de hameaux sont bien réels. Nous savons précisément le nombre de lieues que parcourt le Coeur de l'un à l'autre. Les faits historiques, les découvertes concernant les avancées de la médecine, l'hygiène font prévoir l'évolution de la société archaïque où le rebouteux et le curé gardent encore leur pouvoir que sait contourner ou utiliser le Coeur selon les circonstances.
Je ne me suis pas ennuyée en lisant ce livre. J'y ai parfois trouver des longueurs et des répétitions mais après tout un journal en comporte forcément et ce qui peut sembler au prime abord un défaut peut aussi être considéré comme naturel. le récit s'interrompt avec l'arrivée de la fille du docteur le Coeur en vue de Long Island et quelques pans du récit qui avait pu paraître obscurs sont alors éclaircis.
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