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Critique de PhilippeCastellain


Samuel Taylor Coleridge est un cas curieux. Malgré son style très scolaire, à mille lieux du fantasque et des révoltes d'un Byron, il survit et traverse les époques grâce, tout simplement, à la beauté de son style.

Son oeuvre la plus connue avec ‘Kubla Khan', ‘La complainte du vieux marin' (ou ‘le dit du vieux marin', suivante les traductions) en est l'exemple parfait. Pour avoir tué l'albatros, oiseau porte-bonheur qui accompagnait le navire, le narrateur est maudit. le bateau s'égare, il est condamné à voir l'équipage mourir de faim et de soif. Mais lui ne peut mourir ; l'albatros mort reste pendu à son cou sans qu'il puisse l'en arracher. Il ne trouvera sa grâce que par le repentir ; mais il lui faudra encore errer de par le monde en racontant son histoire.

La gravité et le sérieux de cette belle histoire moralisatrice nous fait sourire aujourd'hui – et déjà dû faire sourire de son temps. Et pourtant... Sa poésie et son écriture sont si belles qu'on y plonge facilement. Les descriptions des paysages marins, du narrateur gagné par la folie, seul sur le navire au milieu des cadavres de l'équipage, sont admirables. A bien des égards elles préfigurent ‘Les Aventures d'Arthur Gordon Pym', mais aussi toute une littérature marine, voir la fascination des pôles.

Les thèmes principaux sont bien sûr le respect de la vie, le péché et la rédemption. Mais apparaît également en filigrane toute une mythologie de la mer, les récits qui circulaient dans les tavernes de marins. le Hollandais Vollant et autres navires fantômes, les oiseaux de mer protecteurs... Colleridge fut un des premiers à s'en inspirer, et il fit école. ‘Le vaisseau fantôme', l'un des grands opéras de Wagner, en fut en quelque sorte l'aboutissement, avant que la première guerre mondiale ne vienne mettre un terme à la marine à voile. Mais on peut toujours compter sur Disney pour (au choix) remettre au goût du jour/piller les vieux mythes.

Cette réédition en fac-similé présente un deuxième intérêt, presque aussi grand : le texte est accompagné de la trentaine de gravure que Gustave Doré réalisa pour l'illustrer. le chef d'oeuvre de l'un des meilleurs graveur de l'histoire, dont le nom reste pour nous indissociablement lié aux contes de Perrault (sa représentation du chat botté a à peine changé dans Shrek) mais qui fut prolixe.
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