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Critique de karmemma


Ce conte librement imprégné de l'esprit de l'antiquité grecque, sous les dehors d'une apparente légèreté, nous invite à nous poser une question philosophique : celle de la connaissance vue comme un idéal à atteindre mais aussi comme un instrument de domination.

Dans le petit archipel où vivent Sophia et Théo, les pouvoirs et richesses sont concentrés entre les mains de guildes, peuplées de privilégiés qui ont eu accès au pouvoir des mots en étudiant à l'université de Philopolis. La population non instruite est traitée comme une simple ressource dont ils disposent à leur guise… En fait, le savoir est accessible à tous les enfants qui sont suffisamment intelligents pour être admis à l'école. Mais il leur faut accepter de quitter leur famille dès l'enfance pour plusieurs années, et prendre un risque majeur : celui de la dyspnoïa, la maladie qui guette celles et ceux qui échouent à l'examen d'entrée à l'université.

Amis d'enfance, Sophia et Théo se retrouvent à l'âge de 10 ans coupés de leurs familles et envoyés à Philopolis, l'une en tant qu'écolière, l'autre comme protégé d'un groupe de résistants au pouvoir en place. A travers leurs expériences, on découvre toutes les failles qui se dissimulent derrière la lumineuse cité du savoir : l'omerta imposée par les puissants sur la réalité du pouvoir des mots, les ravage de la concurrence entre écoliers, les violences et les discriminations exercées par les guildes sur celles et ceux qui ne sont pas des leurs, l'endoctrinement de la jeunesse, la pression insoutenable imposée aux élèves, la destruction des familles, les exactions commises pour protéger le système.
Et pourtant, le monde que défendent les guildes n'est pas une dystopie cauchemardesque : l'érudition y prospère au même titre que les arts et les richesses économiques. Seulement, tout tient sur un système profondément inégalitaire et fermé.

On ne peut s'empêcher d'y voir une critique de notre système universitaire et de la manière dont il reproduit les élites, avec l'illusion de la méritocratie et l'inévitable adhésion que suscite la fascination pour le progrès et le savoir, au détriment de valeurs plus authentiques et plus simples. Mais tout cela est fait de manière merveilleusement subtile, sans renoncer à la dimension aventure qui rend ce roman palpitant jusqu'à la dernière page.
Il faudra les efforts conjugués de deux enfants liés par une amitié indéfectible (et d'immenses talents) pour faire tomber le despote sur qui tient la supercherie, et faire en sorte que ce trésor qu'est le savoir soit enfin équitablement partagé avec tous et toutes.

On apprend dans les remerciements que l'idée de ce roman est née dans le cadre d'un défi de 45 minutes. Un grand coup de chapeau à Nadia Coste pour en avoir fait une fresque fabuleuse, riche et surtout très intelligente, à l'image de ses personnages.
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