Citations sur La fille qui voulait oublier (64)
Même si je semblais exister plutôt que vivre, je remplissais précautionneusement chaque minute de ma journée. Tout temps libre était toxique pour moi. Dans ces situations, mes pensées pouvaient prendre le dessus sur moi, ce qu’il me fallait éviter à tout prix. Garder mes pensées à distance était devenu mon principal objectif.
Je ne m’attendais pas à ce qu’elle, ou n’importe qui d’autre, me comprenne, mais tout changement dans ma routine me faisait me sentir vulnérable. J’avais besoin d’ordre. Besoin que tout soit exactement comme il devait l’être. Rien qui sorte de l’ordinaire.
Je ne pouvais pas laisser un inconnu interférer ainsi avec ma propre existence. Je vivais ma vie dans mon coin, sans faire de mal à personne ; quel droit avait-il de saper les bases de mon monde ? Même si je ne pouvais pas faire grand-chose pour éviter qu’il me contacte à nouveau, je ne resterais pas assise là sans rien faire, lui laissant penser que son action portait ses fruits.
C’est maintenant ou jamais.
Je maintiens cette vitesse pendant un moment, puis braque d’un coup sur la droite, envoyant tout le monde heurter les portes avec fracas.
J’ai de la chance : il y a maintenant un arbre devant nous, avec un énorme tronc large et solide, et l’on dirait que c’est lui qui se rue sur nous plutôt que l’inverse. Il vient nous chercher.
Je ferme les yeux et attends que le karma nous emporte tous.
Vivre dans le présent et l’avenir compte bien plus pour eux que de revivre le passé.
Les gens font de drôles de choses, en état de choc. On ne sait jamais comment on peut réagir dans certaines situations extrêmes.
Pourquoi ne nous ordonne-t-elle pas de partir, pourquoi ne menace-t-elle pas d’appeler la police ? Pourquoi ne crie-t-elle pas ? Mais il paraît que sous le choc, les gens font souvent des choses bizarres. C’est peut-être pour ça que je reste figée sur place.
Certes, Adam est un petit génie, mais pas pour ce genre de chose. Peu importe que le plan de ce soir soit bien préparé, ça reste une grosse connerie. Et je n’ai qu’une envie : que tout ça soit terminé, que l’on puisse commencer à vivre notre vie ensemble.
J’ai du mal à me l’avouer, mais ce qui m’ennuie aussi, c’est d’avoir l’impression de ne plus faire partie du groupe. Ils font ça sans moi, et visiblement, ça ne les dérange pas spécialement. Imogen a appelé ce matin et m’a demandé à contrecœur si j’avais changé d’avis, mais son manque d’enthousiasme n’a fait que me conforter dans ma décision de refuser. Peut-être suis-je en train de tester les limites de notre amitié. Le résultat pourrait être qu’elle m’explose à la figure, ou alors que l’on soit encore plus forts ensemble.
Mon cœur bat plus vite et je presse le pas tout en maintenant une bonne distance entre nous. Au moins, je serai fixée. Il vaut mieux savoir, non ? Si Adam ne veut plus de moi, je ne vais pas le forcer. Comme l’a dit mon père, je suis jeune. Je rencontrerai bien d’autres garçons.