Le Drogman de Bornéo

Lionel Crooson a joliment bien fait de ne pas se cantonner à des articles pointus relevant des Sciences humaines qui généralement n'intéressent que les spécialistes. En effet, en écrivant ce premier roman, il permet à tout un chacun de découvrir à travers la magnifique aventure de son héros Victor Roboly, des contrées aussi lointaines et méconnues que cette grande île de Bornéo. Ce qui est passionnant, c'est que par ce biais, il réussit à transmettre ses connaissances en matière de flore, de faune, d'habitat, de coutumes, sans que jamais l'on ne s'ennuie. Dès la première page, l'auteur nous entraîne sur les rivages de l'île de Bornéo, « la dame endormie » et nous avançons à ses côtés comme si nous y étions. Il décrit avec une telle précision la jungle équatoriale que notre imagination est d'emblée captive de ses mots. Non seulement nous ne quittons plus Victor mais nous avons cette envie impérieuse de découvrir avec lui le fameux secret. Attention, Victor n'est pas Harrison Ford à la poursuite d'un diamant vert (quoique...). C'est un interprète d'ambassade en quelque sorte, un « drogman », chargé d'une mission de haute importance, qui va peut-être bouleverser les bases de l'anthropologie...
A l'heure où nos cerveaux enregistrent passivement les images sur écran, ce tour de force qui consiste à faire du lecteur le réalisateur de son propre film, est sans nul doute la patte d'un véritable écrivain. Et Lionel Crooson a de surcroît toute sa légitimité puisque si l'on s'en réfère à sa dédicataire, il est lui-même le descendant d'une famille de drogmans qui ont servi la France dans l'empire ottoman.
Sur Internet, on peut voir de plus près évidemment la carte de Bornéo et l'Etat du Sarawak, les photos des Dayaks, les fameux coupeurs de têtes, celles des rajahs blancs, les Brooke de père en fils....
Tout ce que l'on peut espérer c'est que l'auteur continue sur sa lancée et nous fasse vivre d'autres histoires aussi passionnantes !