Je tiens à rectifier ici les versions mensongères qui nous montrent sous les traits des pires desperados : nous n'appartenions pas à cette espèce de malfrats qui faisaient irruption dans les villages en faisant crépiter les coups de feu. Parmi les innombrables crimes qui nous ont été imputés, une grande partie résulte des calomnies produites par les marchands de scandales, quand elle n'est pas le fruit de mensonges éhontés colportés par ces pseudo-détectives engagés par les compagnies de chemins de fer. D'autres inventions proviennent encore de l'incompétence de certains représentants de la loi qui, incapables d'élucider certaines affaires, se couvraient en concluant : "C'est un coup des Dalton."
Nous ne combattions pas la loi, mais la manière dont on nous l'imposait.
En ces époques barbares, ce que nous percevions de la loi n'était que l'une des facettes de la corruption légitimée par l'institution.
Les compagnies de chemins de fer qui étendaient leur mainmise sur le pays en spoliant les terres, ainsi que les banques dont l'empire tentaculaire s'étendait de façon inquiétante, commirent à elles seules plus de méfaits et de crimes que tous les gangs qui terrorisaient l'Ouest.
On en arrive à accorder plus de prix à un cheval qu'à une vie humaine ou à la liberté d'un homme. Actuellement, un procès se réduit à un jeu opposant les avocats et le juge, chacun visant à disqualifier l'autre au moyen de ruses légales tentant d'interpréter subjectivement la loi. ON perd de vue là question essentielle de savoir si l'accusé est coupable ou innocent pour se focaliser sur des points de détail techniques au cours d'une joute de spécialistes.
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