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Critique de kielosa


"L'ASSASSIN OBÉISSANT"

Tel sera probablement le titre de ce roman en français, qui, comme l'indique son éditeur américain, est basé sur une histoire véritable avec des héros ayant réellement existés.

Tout le monde sait que Léon Trotsky, révolutionnaire russe et premier chef de l'Armée Rouge, a été brutalement assassiné, sur orde de Joseph Staline, au Mexique le 21 août 1940. Mais qu'est devenu son meurtrier, le nationaliste espagnol Ramón Mercader ? C'est la question à laquelle le journaliste texan, John P. Davidson, répond, bizarrement sous forme de roman ou thriller. Pourquoi avoir opté pour une telle formule, plutôt qu'un récit des faits réels de cet assassinat spectaculaire, qui a choqué le monde, sympathisants des révolutionnaires d'Octobre ou le contraire ?
Personnellement, je vois deux raisons : 1) Ainsi, l'auteur a pu faire 'vivre' Lev Davidovitch Bronstein, juif né à 60 kilomètres d'Odessa en Ukraine en 1879, mais mieux connu sous son nom de guerre Trotsky, et les artistes-peintre mexicains Frida Kahlo (y Calderón, 1907-1954) et Diego Rivera (1886-1957), sans oublier, bien sûr, le dénommé Mercader. 2) le geste 'héroïque' de ce dernier et les réactions à travers le globe en faisait même pour les communistes russes un 'cadeau empoisonné' , à l'exception, toutefois, du petit père des peuples, qui a certainement du se réjouir de la liquidation de son rival numéro un. Car outre le fait que les écrits de Trotsky étaient loin de lui plaire, le Maître du Kremlin avait deux grandes 'qualités' : une excellente mémoire et le refus de toute faiblesse, comme par exemple le pardon. Beaucoup de français se souviennent que le même sort avait été réservé, 2 ans avant en février 1938, au fils aîné de Trotsky, Lev Sedov (né en 1906) dans un hôpital parisien, où le pauvre aurait succombé à une appendicectomie !

Que Mercader était un cadeau empoisonné à Moscou n'est nullement le fruit de mon imagination. de tous les vrais et faux opposants de Staline, liquidés sur ses ordres, Trotsky est le seul et unique à ne jamais être réhabilité officiellement par les autorités russes. En effet, Mikhaïl Gorbachev craignait probablement les réactions des membres du Politburo et ce n'est sûrement pas de Vladimir Poutine, avec sa nostalgie des temps glorieux de la Révolution d'Octobre, que l'on peut s'attendre à un tel geste. Alors l'auteur de cet acte infâme son sort est assurément très problématique pour tout gouvernement russe.

Mais ce Ramón Mercader d'où sortait-il et où est-il allé après le triste épisode mexicain ?

Jaime Ramón Mercader, né à Barcelone en 1913, devient très jeune communiste et lors de la Guerre Civile espagnole, officier et commissaire dans l'armée républicaine, où les brigades internationales étaient dominées par les Russes. J'ignore s'il a rencontré Aleksandr Orlov, qui en était le chef (voire ma critique du livre 'Deadly Illusion' à ce sujet du 21-03-2017), mais toujours est-il qu'il y a été recruté comme agent du NKVD (le précurseur du KGB). Petit détail pour les cinéphiles : la demi-soeur de Ramón, Maria Mercader, à été la 2ème épouse du régisseur italien Vittorio de Sica.

Sur ordre explicite donc de Staline, le sinistre Lavrenti Beria chef du NKVD fut chargé de l'opération, mission qu'il confia au général du KGB, Pavel Sudoplatov (dont j'ai mentionné l'autobiographie, comme livre n°100, dans ma liste récente 'Ces Messieurs Dames de l'Ombre ') et l'exécution elle-même à Mercader. Munis de faux papiers belges - ce qui 77 ans après me fait toujours enrager - il a reussi à s'introduire, comme journaliste, dans l'entourage immédiat et le bastion sérieusement protégé de Trotsky. le coup mortel avec un piolet est assez connu pour être raconté ici. Peut être juste que cet 'arme' est actuellement exposée dans un musée à Philadelphie aux États-Unis.

Ramón Mercader fut condamné à 20 ans de prison au Mexique (où il a rencontré son épouse Roquella), puis est parti pour L'URSS, où sa réception fut plutôt froide, bien qu'il a reçu l'Ordre de Lénine. le climat peu clément de Moscou et les conditions de vie vie ne lui plaisant guère, pendant 14 ans, il a demandé un transfert à Cuba, toujours refusé. Probablement jusqu'à ce que l'on apprenne qu'il était gravement malade, puisqu'en octobre 1978, il meurt finalement d'un cancer à La Havane.

Le nombre d'ouvrages relatif à cette liquidation politique tristement célèbre est pléthorique. Je me permets juste d'en recommander celui de Pierre Broué : 'L'assassinat de Trotsky' de 1980. Une intéressante biographie de la victime est certainement celle de Jean-Jacques Marie : 'Trotski : le révolutionnaire sans frontières' de 2006.

Quant à l'ouvrage de John P. Davidson, à part qu'il soit aussi très intéressant et qu'il m'a plu, il s'agit d'un vrai 'pageturner' , qu'on ne dépose pas avant d'avoir tourné la dernière page.
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