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Critique de lorettelaure


Un livre vivant et passionnant qui nous plonge dans les bas-fonds sans pour autant nous lasser. On ne s'ennuie jamais et l'humour de l'auteur nous fait passer la pilule. Cependant, Patrick Declerck est psychiatre, et si la grille utilisée nous livre certaines clefs importantes ( les clochards boivent pour éviter la rumination, c'est-à-dire, le souvenir obsédant d'un traumatisme), elle en biaise parfois d'autres. Les clochards, nous dit l'auteur, sont masochistes. Alors que le personnel de Nanterre leur a précautionneusement rangé les papiers dans une armoire, papiers qui leur permettent d'obtenir des aides, la moitié d'entre eux les réclame avant de partir pour une beuverie, … et les perdent systématiquement ! Quel masochisme en effet ! Sauf …. que des papiers, ça se vend ! Les clochards vivent au jour le jour, drogués par l'alcool. On sait bien que n'importe quel drogué fera tout pour se procurer sa came sans songer au lendemain. de plus l'auteur s'interroge sur le fait que ces personnes ne rentrent pas dans le cadre, même si on voit dans leurs discours les raisons qu'ils invoquent. Patrick Declerck laisse ces arguments de côté. La vie asservissante d'un travailleur en usine qui les saoule ne semble pas un argument suffisant à l'auteur pour vouloir lâcher prise et s'envoler avec les potes vers le sentiment de liberté que doit leur provoquer leurs envols vers la folie des déliriums trémens…. assourdissants, anesthésiants…. Portes d'un lent suicide inconscient !
Les psy s'interrogent toujours sur le pourquoi ne rentre-t-on pas dans le moule ? Jamais il ne leur vient à l'esprit, certainement du fait de leur condition sociale et de leur formation, de se demander pourquoi la plupart des gens rentrent-ils dans ce moule. Comment s'y prennent-ils ? Quelle est le mode d'éducation qui est parvenu à les formater à ce point ? Comment parviennent-ils, durant toute une vie à se lever contre-nature, à manger sans tenir compte de leurs besoins originels, à travailler sans plaisir pour l'enrichissement d'un autre …. Payer leurs taxes, leurs frais de voitures … etc… juste pour pouvoir travailler ! le travail n'est pas un loisir ! Mais il n'est pas de bon ton de l'avouer. On préfère le nier, c'est mieux vu. Les classes « bien pensantes » ont tendance à l'ignorer, parce que certains métiers sont passionnants … mais ceux-ci sont bien-sûr réservés à l' « élite ».
Les clochards ont très peu été éduqués, et de ce fait, deviennent inaptes à accepter leur condition et leur futur. Ils ont tenté d'y croire, de se battre, de travailler, puis un jour, ils ont renoncé. L'abus d'alcool, de drogue ou de folie ont fait le reste !
L'auteur avance que la pauvreté rend les gens méchants. Pour moi c'est un raccourci qui ignore les effets de l'alcool et de la destruction du cerveau qu'il engendre, d'une part, et celle issue des traumatismes. Pour moi, la violence subie, le sentiment d'injustice et l'impression d'être dans une voie sans issue mêlés aux conséquences des drogues et de l'insécurité sont les souffrances qui engendrent la violence. Combien de peuples pauvres sont d'une gentillesse remarquable ? Dire que les pauvres sont méchants n'arrangerait-elle pas les classes favorisées ?
Hormis ces quelques critiques que je me suis autorisées, j'ai apprécié cette démarche.
Qui ne s'est jamais posé la question de la clochardisation dans un pays où les aides sociales sont particulièrement développées ? Les naufragés sont une tentative de réponse à cette question, une trace du passage sur terre de ces laissés pour compte.
L'auteur a raison. Non, il n'y a pas de solution pour ces pauvres gens, les dés sont jetés depuis trop longtemps, peut-être même avant leur naissance, dit-il, dans le ventre de leur mère qui buvait elle-même, pour certaines d'entre elles au moins.
Et c'est tout ce désespoir que leur histoire peut nous transmettre…. Celui de leur vie, leur passé, leurs projets qu'ils n'ont pas, le cadre dans lequel ils sont nés, celui dans lequel ils sont sûrs de mourir, quoi qu'il arrive. le destin.
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