Ici repose

Il a été difficile pour moi d'entrer dans ce roman. Le style d'écriture de Philippe Defins est souvent très haché : des phrases courtes, parfois nominales, parfois sans sujet. C'est comme un long poème en prose dont les mots n'ont pas toujours fait sens pour moi, mais qui semblaient avoir été choisis pour leur sonorité ou les images qu'elles pouvaient évoquer.
L'histoire se résume en quelques lignes : Alep, après une grosse « bêtise » de jeunesse et sa fuite consécutive à un séjour en prison, tente de reconstruire sa vie. Mais les démons l'habitent toujours et il veut à nouveau fuir, fuir son travail, fuir sa femme, fuir sa vie, alors que tout semble être réussi. Fuir ? Pour aller où ? On ne sait pas. Alep semble errer et s'interroger. Le lecteur aussi.
Il se confie par bribes à son médecin avec lequel il finit par nouer un lien, d'amitié peut-être, de confident.
La construction du roman jette également le trouble : tout commence à la troisième personne,avec le Docteur Palma, dans le cabinet duquel le lecteur fait connaissance avec Alep. Puis certains chapitres sont rédigés à la première personne, comme des parenthèses dans l'histoire ; je n'ai pas vu le lien avec elle, je n'ai pas compris de quoi il parlait, de quel lieu, de quelle époque. Il faudra attendre la fin du roman pour savoir qui est ce narrateur.
Même si j'ai trouvé de la poésie dans certains passages, je n'ai pas vraiment apprécié ce roman (je me demande s'il entre dans cette catégorie) , comme je n'apprécie pas en règle générale les romans trop « intellectuels » au sens où je dois sans cesse essayer de comprendre de quoi parle l'auteur et où il veut en venir. D'ailleurs, il émaille son texte de références à Créon et Antigone, comme si elles étaient évidentes, ce qui me semble opérer une sélection dans le lectorat.
Peut-être Philippe Defins devrait-il se lancer carrément dans l'écriture de poésie, pour laquelle il me semble avoir un certain talent, mais en tout cas, ce roman m'a laissé un goût amer.