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Critique de YvPol


Hubert Delahaye est un passionné de l'Extrême-Orient et notamment du Japon, il a publié plusieurs livres dont trois que j'ai lus et beaucoup aimés : Lettres d'Ogura, Histoires de mers et de thé et d'amour. Changement d'éditeur et de registre pour le faux frère, mais pas de changement quant au plaisir de lire Hubert Delahaye. Son écriture est fine, délicate et elle va au plus profond de ses personnages, au plus intime, sans artifices, sans effets. Tout paraît si simple, comme cette phrase pour parler de Marcel, de son décalage dans la société actuelle, qui m'a sauté aux yeux, en apparence anodine : "Il est dépassé, il est du passé, il le sait et il le plaide" (p.123) L'on pourrait croire en débutant le livre que cet homme qui va raconter sa vie est un type ordinaire qui n'a pas grand chose à dire. Mais que nenni ! Hubert Delahaye, tranquillement et sûrement fait naître une tension entre les deux frères, tension qui s'entend dans quasiment tous les mots du narrateur. Et son roman de se noircir, de s'alourdir, tout en restant très policé, car lorsque l'homme qui parle s'énerve, il le fait poliment et sans cri. Même ses emportements envers la société actuelle sont élégants : "Les marchands sont des malins. Ils maîtrisent l'art de rendre obsolète ce qui passait hier encore pour une audace. Ils ont du flair pour inventer de nouvelles superfluités, de nouvelles nouveautés. Ils sont là pour m'aider, pour me fournir une raison de vivre. Acheter devient un acte existentiel." (p.10/11) Sa relation avec son frère pèse sur chacun des actes de sa vie. Lui, victime d'un pervers narcissique parviendra-t-il à surmonter ses traumatismes ? Ou alors n'est-il pas schizophrène et son frère Marcel une invention ? Je dois dire que cette question m'a hanté une grande partie du livre. Et alors, craindre une rencontre avec Éliane et redouter qu'elle ne finisse mal... L'écriture d'Hubert Delahaye laisse imaginer une histoire tranquille, linéaire, et c'est tout le contraire qui arrive. En loucedé, écris-je pour prendre le contre-pied de l'auteur qui n'use que de beaux mots et de belles phrases, ce qui ajoute à la tension, car quoi de plus imprévisible et effrayant -toute proportion gardée- qu'un homme à la colère intérieure, qu'une catastrophe décrite calmement ?

En digressions, certains passages pourraient être lus et médités en haut lieu, notamment sur le travail : "Pourtant, l'idée de travailler comme un forcené pour un progrès discutable, vu l'usage qu'on en fait, gagnerait à être explorée davantage. On remarquerait en passant que plus le progrès apporte d'outils et plus il faut travailler longtemps et durement quand, en bonne logique, on attendrait le contraire." (p.65) ou dans le métier du livre : "...j'ai toujours été angoissé à la vue des pavés de cinq cents ou mille pages qu'on trouve en abondance dans les kiosques des gares. C'est un genre de littérature au kilo qui fait du tort aux forêts." (p.72)

Cent cinquante pages qui se dégustent, qui se lisent lentement, histoire de n'en rien rater, auxquelles on en ajouterait bien un peu, tant pis pour les forêts, juste pour le plaisir, parce qu'aucun mot en trop ni aucun ne manque. Parfait !
Lien : http://www.lyvres.fr/
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