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Critique de KarmaBoomerang


Mon avis :

A quarante ans, au chômage pour la première fois, François se retrouve seul face à lui-même. Seul? Face à lui-même? Pas tout à fait. A hasarder dans Paris, tout ce qu'il voit lui rappelle son enfance, les années cinquante. Les photos en noir et blanc de l'époque s'affichent partout, en cartes postales, en poster. Les images sont rattachées à des souvenirs pour lui, mais quand il voit que tout le monde se les approprie, il se met à douter de ce qu'il a eu finalement. Tout le monde semble se reconnaître dans les mêmes souvenirs, les solex, les repas du dimanche midi chez les grands-parents en banlieu, le manège du jardin du luxembourg, les modèles réduits de voitures de telle ou telle marque... Tellement bien qu'il en vient à douter, est-ce vraiment son enfance, ou celle de toute sa génération?

Le fil rouge du roman, c'est ce cliché de Doisneau, le Baiser de l'Hôtel de Ville. Depuis toujours, ses parents lui ont dit que c'était eux, les amoureux de la photographie. Maintenant qu'il est adulte, François sait bien que ce n'était qu'un mensonge, mais il tente de concilier deux visions contradictoires: la sienne, l'image de deux parents jamais ensemble, toujours séparé par lui, le trait d'union, la déchirure. Et l'image du Baiser, les deux amants, ce mythe qui est finalement devenu une photo de famille pour lui.

Ce roman de Delerm décrit avec une infinie justesse (ce qui est d'après moi la grande force de cet auteur) une myriade de petites émotions, mi-nostalgiques mi-tendres. Un autre auteur aurait pu faire de ce thème quelque chose de lourd, de difficile, chargé de conséquences. Ce n'est pas le cas avec Delerm. le style est fluide et il étonne. Il utilise des termes que l'on n'aurait pas pensé à employer ensemble, pour faire ressortir un sens plus "vrai". On pourrait l'inscrire dans une vague minimaliste, parler du "rien" pour faire deviner le "tout". En s'attardant sur tel ou tel détail, il parvient avec cent fois plus de pertinence à nous faire sentir toute une époque, une ambiance, que s'il avait essayé de nous la dépeindre à grandes eaux.

Quoi qu'il en soit, je conseille aux gens d'essayer de lire du Delerm, une fois dans leur vie. Peut-etre pas ce roman là, précisement, peut-être plutôt un de ses recueils de textes courts, comme La Première Gorgée de Bière, mais c'est vraiment le genre d'auteur à essayer, car peut-etre que vous n'aimerez pas, peut-être que son style ne reveillera rien chez vous, mais si c'est le cas sa manière d'écrire vous touchera de plein fouet, comme une vérité vous éclatant au visage...


Ma note : 3/5
J'aurais sans doute mis 4/5 si j'avais voté juste après avoir fini ce livre, mais avec le recul, je me rends compte que c'est surtout le style de l'auteur que j'apprécie, plus que le livre en lui-même, donc j'essaie d'être un peu plus objective... Après, je trouve que c'est vraiment un livre agréable à lire, mais peut-etre parce que j'aime l'auteur, je pense que ça joue pas mal. En premier livre, je ne sais pas si je l'aurais apprécié autant.


Je le conseillerais à... : des gens qui attachent de l'importance aux détails, aux petites choses qui font un tout, qui donne la vraie "couleur" des choses. Je le conseillerais aussi aux gens qui ont connu leur enfance dans les années 50, car apparement, j'ai entendu dire que ce livre les touchait beaucoup, qu'il leur "parlait".
Je le conseille aussi aux gens qui ont envie de se laisser porter par une douce mélancolie, mais une mélancolie "dégustée", heureuse presque. Delerm, pour moi, c'est toujours une écriture qui apaise, c'est jamais lourd, toujours avec une sorte de doucereuse nostalgie, qui vous donne le sourire même en parlant de passé triste.

Je le déconseillerais à... : des gens qui ne s'interessent pas aux "retours à la source", à l'analyse de soi, à la rétrospection etc...
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