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Critique de umezzu


Cette BD date un peu (2003), mais le portait du pays fermé qu'elle décrit, la Corée du Nord, et de son régime totalitaire dynastique, n'a guère changé : de Kim Jong-Il on est juste passé sans évolutions à Kim Jong-un.

Delisle fait le récit d'un séjour de deux mois à Pyongyang, où il était envoyé pour contrôler la production des dessinateurs de film d'animations locaux, chargés de venir compléter les dessins d'une série française. Un choix de production purement financier, qui se heurte aux règles très particulières de contact entre nord-coréens et étrangers instaurées par le pouvoir local. Chaperonné par un guide et un traducteur, logé dans un hôtel pour étrangers quasi-désert, Delisle ne verra qu'à une seule reprise les dessinateurs. Il communiquera ses instructions via des traducteurs aux réalisateurs locaux. Au gap culturel, s'ajoute l'impossibilité de dialoguer librement.

Les étrangers de passage regroupés dans le même hôtel en sont réduits à multiplier les parties de billard entre eux, à aller aux quelques fêtes lancées par les humanitaires des ONG (parqués dans un quartier qui leur est dédié), et à se résoudre à suivre leur guide dans les visites obligatoires de la statue de Kim Il-Sung, du Musée de l'Occupation Impériale ou celui des présents reçus du monde entier par leurs leaders. Autant d'occasions pour la propagande locale de diffuser le culte des dirigeants bien aimés (dont les portraits figurent à chaque coin de rue, peints sur les falaises, ou placardés sur les murs de l'hôtel). Delisle s'énerve un peu (dans sa tête) mais se retient pour pouvoir accomplir sa mission en respectant les formes diplomatiquement acceptables. Il finit par trouver le temps long et à attendre la relève avec impatience.

Sous forme de témoignage indirect (puisqu'il n'a jamais pu parler vraiment avec les locaux), d'anecdotes amusantes et de réflexions savoureuses, Delisle relate un voyage hors-normes dans un pays cadenassé. Au final, il se demande si les guides et traducteurs collés à ses basques, l'accompagnant partout (impossible de prendre un taxi sans eux), croyaient vraiment à leur discours, ou avaient fini par refuser d'avoir tout regard critique sur un pays qui à l'époque était le pays le plus aidé au monde par les ONG.

Les dessins sont assez frustres, mais ils conviennent bien à ce journal graphique d'un pays hors du monde contemporain (lequel est rempli d'Américains tortionnaires avides de sang et d'occidentaux dépravés selon le discours officiel local).

Cette BD est une excellente introduction à ce qu'est la Corée du Nord. Pour ceux qui veulent aller plus loin, je conseille le roman l'Étoile du Nord de D.B. John.
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