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Critique de elea2020


J'ai apprécié ce récit, témoignage très atypique, qui d'une certaine manière fait rêver comme une moderne robinsonnade, et nous apprend nombre de choses sur la forêt, et cette espèce assez méconnue, quoique familière, que peuvent être les chevreuils.

Depuis l'enfance, Geoffroy se sent mal parmi les siens : il a été déscolarisé suite à une mauvaise expérience scolaire (harcèlement et mise en danger), et s'ennuyait à apprendre chez lui, ne trouvant pas de perspective pour son avenir, et se sentant seul. Assez rapidement, il se sent attiré par la forêt, sympathise avec des animaux, jusqu'à rencontrer les chevreuils, et vivre de plus en plus dans la forêt de Louviers, en Normandie.

Geoffroy Delorme nous livre un récit varié, intéressant, relatant des temps émotionnels forts liés à ses rencontres et amitiés avec plusieurs groupes de chevreuils, les temps d'apprivoisement, lors desquels il respecte toujours la distance nécessaire avec l'animal. Il a toutefois la chance de fréquenter des individus exceptionnels, curieux, malicieux, parfois tendres, et pour certains véritablement intelligents : on se rend vite compte, et il insiste là-dessus, que chaque chevreuil est un individu, avec ses particularités et son caractère. Il nous explique leur mode de vie, en des termes précis et justes, sans surenchère de technicité, mais aussi les conséquences des pratiques humaines telles que l'exploitation forestière, la chasse... Il nous fait part également de ses propres difficultés, car, même s'il admet honnêtement être au départ rentré une à trois fois par mois pour des courses alimentaires ou pour se laver, dormir et se réchauffer, plus il avance dans le temps et moins il se sent à l'aise dans la vie humaine. Ainsi, il se met à manger des feuilles, des fruits qu'il trouve en forêt ; il adopte le cycle de vie des chevreuils - manger et dormir par cycles courts (pour ne pas souffrir d'hypothermie par exemple), les suivant sur leurs territoires et faisant tout comme eux, traversant leurs épreuves, et apprenant d'eux comme ils apprennent de lui.

J'ai été séduite par ces êtres adorables qu'il nous présente, par les photographies, je me suis intéressée à chaque famille, aux étapes familiales : naissance des faons, défense du territoire, émancipation des chevrillards, période des amours... J'ai bien sûr été émue par les inévitables drames de cette vie sauvage. Il me semble qu'il est tout à fait possible d'adhérer pleinement à son choix et de le comprendre, même si cela a impliqué de grands sacrifices, et des difficultés physiques. L'auteur a vécu ainsi 7 ans, ce qui lui confère une légitimité existentielle que l'on peut difficilement remettre en cause. Mais, c'est là où le bât blesse : comment qualifier ce récit ? Geoffroy Delorme n'a pas de formation scientifique, quoiqu'il finisse par prendre parti et propose des solutions pour une gestion plus durable de la forêt. Il ne m'a pas paru excessif en ce qui concerne la chasse, ni le déboisement, il a une vision modérée de la situation. On voit toutefois trop bien ce en quoi des esprits hostiles peuvent facilement le discréditer. Pourtant, je le répète, il ne pêche même pas par excès d'anthropomorphisme, ni d'ingérence dans la vie animale. Pour autant, se présenter aujourd'hui comme "spécialiste des chevreuils" me paraît abusif, même si je comprends qu'il souhaite les faire connaître et défendre leur cause.

Alors certes, le récit est assez plat, plus journalistique que littéraire ; toutefois, on s'y prend facilement, je n'ai pas constaté de longueurs, et de belles pages nous attendent au tournant de cette étonnante expérience. A découvrir, pour élargir nos perspectives et rêver de vie sauvage.
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