Le deuil de ma mère s'est accompli cette fois-là dans l'église de Val-Paradis, le deuil de ce qu'il y avait de meilleur en elle, de sa capacité de nous projeter dans l'art, de nous enseigner l'envers des choses, de refuser le main stream de la vie. En écoutant Prokofiev, j'ai compris aussi que c'était un piège, et que ma mère nous enfermait paradoxalement dans son monde tout en nous enseignant ses chemins de liberté totale. Le non-conformisme pur et dur est une exigence quasi religieuse. Un cloître dont on ne peut s'échapper. Avec ma mère, impossible de se relâcher, de se permettre un instant d'être comme ces gens qui sont comme tout le monde, qui ne cherchent pas à être uniques et qui font leurs achats chez Walmart. À force de vouloir être absolument libre, on se barricade.