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Critique de berni_29


Comment parler d'un livre qui vous échappe sans cesse au cours de sa lecture et lorsque vous le refermez pour vaquer à autre chose, d'autres lectures sans doute, il vous manque déjà ?... Car c'est l'impression que m'a donnée la lecture de Taba-Taba. Son auteur Patrick Deville nous égare sans arrêt dans ce road movie surprenant et atypique.
Il y a quelque chose de touchant dans ce voyage qui vous mène depuis Saint-Nazaire jusqu'aux terres ensanglantées de Verdun, en passant par le Caire, Managua, Khartoum, Rome, …
Il est impossible de raconter Taba-Taba sauf dire qu'il est grandement autobiographique et que l'auteur, en allant chercher par monts et par vaux l'itinéraire chaotique des siens depuis le Second Empire, ne parvient sans doute pas à recomposer totalement le puzzle d'une histoire familiale éclatée, ballottée par les guerres, jetée sur les routes ; tout juste parvient-il à tenter d'apaiser une douleur qui remonte depuis l'enfance. Ce texte est une longue digression.
Patrick Deville a mis à sa disposition de nombreux documents, courriers, carnets de voyage, archives familiales, rassemblés au gré des guerres et des déménagements. C'est une richesse, une chance, alors que parfois dans certaines familles tout est détruit, rien n'existe plus comme trace d'un passé. Ce texte est érudit, fouillé. Il visite la Grande Histoire par les gens de peu que nos parents et grands-parents furent… Car Patrick Deville, en parlant des siens, parlent forcément des nôtres et c'est là que vient l'émotion aussi.
Taba-Taba nous parle du déracinement et de l'exil. Nul besoin forcément de partir loin pour connaître cette douleur. Mais Patrick Deville cherche à aller plus loin, prendre des avions, des trains, une Passat,… sortir du cadre pour mieux comprendre, questionner, dire l'impossible face au tumulte du monde. C'est là qu'il s'en va si loin…
C'est un livre fait de pudeur. Il sait interroger les siens à travers le temps, sentir ce qu'un homme ressent au crépuscule de sa vie, avec les peines et les regrets… Il sait dire ce qu'une vie est faite par ces accidents que sont les histoires d'amour, les rencontres magnifiques qui furent et celles qui sont à jamais manquées,…
En questionnant la Grande Histoire, il nous étonne aussi par ces petits riens que l'on ne trouvera jamais dans aucun manuel scolaire. Ainsi, qui se souvient que la première guerre mondiale a rendu la terre de onze départements de France, soit un septième du Pays, stérile pendant sept siècles… ? Et ce poème tant glorifié dans les cérémonies et les enterrements : « tu seras un homme mon fils » ? Il ne sera désormais plus possible de l'entendre comme avant sans penser à la terrible et fatale injonction qui poussa son auteur Rudyard Kipling à l'écrire pour son fils aux prémices de la Grande Guerre…
Nous refermons ce livre et nous pensons aussi à nos enfants…
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