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Critique de fuji


La rage de vivre libre.
Un récit où présent et passé sont entrecroisés.
Une vie ne devenir dans un autre pays mais surtout une autre langue où le quotidien et ses vicissitudes se posent pour des séances psy qui font resurgir les fondements.
Le lecteur passe de l'un à l'autre sans heurt car il y a un enrichissement, une mélopée de bribes de vies enchâssés.
Comme pour Shéhérazade il s'agit de sauver sa vie.
Partir de Téhéran c'est déjà une aventure dangereuse. Arrivée à Istanbul Donya doit survivre, arrivée à Paris c'est la solitude.
« Elle avait le mal de son pays qui allait si mal, de plus en plus mal. L'Iran était le pays de ses souffrances et il lui manquait. »
Fuir la violence car elle est extrême pour les femmes en Iran, en 1991 il faut fuir le viol, la prostitution, le mariage forcé, l'autoritarisme patriarcal…
Il y a de quoi ne plus vouloir vivre mais finalement, une obligation de suivre une thérapie et reprendre le cours d'une vie à réinventer.
C'est aussi lors de ces séances la recherche de sa voix française pour trouver la voie qui lui permettra de vivre.
Le périple commence par Istanbul si la vie n'y est pas simple, il y a de vraies rencontres.
Mais 1993 c'est Paris, ses multiples petits boulots pour survivre et étudier, c'est apprendre la langue pour exister et être griffée par la solitude.
« Malgré sa carte de séjour, pendant les premières années, elle vivait dans la clandestinité à Paris. Elle travaillait au noir. Elle apprenait la langue dans sa chambre de bonne, seule, le soir. Elle ne touchait aucune aide, car elle n'en avait pas fait la demande. Outre son orgueil d'aristocrate qui lui défendait d'aller faire la queue avec des pauvres pour obtenir des allocations, elle craignait d'être dénoncée. »
La colère lui permet de fuit, la rage lui permet de survivre, les deux l'amèneront à vivre.
L'auteur de cache pas le côté sombre de cet exil et de la condition féminine.
Elle explore les gouffres dans lesquelles elle pourrait sombrer corps et âme.
L'angoisse qui taraude le corps et l'esprit et ses conséquences.
C'est un portrait complexe et complet.
Une héroïne boxant la face du monde, un uppercut que le lecteur reçoit.
Finalement ce sont les séances psy qui sont les respirations, car l'auteur y fait preuve d'une insolence salutaire et nous surprend à éclater de rire.
« A quoi ça sert la psychanalyse ? En guise de réponse le psy soutient son regard effronté. »
Un portrait de femme très fort, hors du commun, sans fard juste accompagné par une très belle écriture.
Un enseignement pour tous ceux qui ignorent ou veulent ignorer ce qui se passe ailleurs et qui entraîne un exil où la violence revêt un autre visage, celui chez nous de l'indifférence, la peur de l'autre.
Je suis admirative et bouleversée par ses destins où sans la rage il n'y a plus de vie possible.
« A l'aube elle nota :
Ce matin
Je me suis réveillée
Née
Sans obsession, sans image, sans idée poussiéreuse.
Une herbe, une goutte de rosée.
Une seconde ou mille ans
Qui durent une éternité.
Légère, vide ou pleine de bonheur
Sans soucis, sans demains, sans hier.
Juste une herbe, une rosée, une pensée. »
©Chantal Lafon

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