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Critique de evergreen13


L'influence des étoiles
Fin octobre 1918. La guerre n'est pas terminée mais c'est à un ennemi redoutable que les populations militaires et civiles doivent faire face, une maladie hautement létale, la grippe. A Dublin personne n'est épargné. Il faut dire que dans les villes, les irlandais vivaient dans une grande promiscuité et une telle pauvreté que la maladie ne pouvait que se propager à la vitesse de l'éclair. A l'hôpital, un service spécial a été ouvert pour les femmes enceintes atteintes de la grippe où nous allons suivre pendant trois jours, Julia Power, une jeune infirmière d'à peine trente ans, seule ou presque pour lutter contre la mort et pour la vie.
Ce roman est passionnant. Découpé en quatre parties qui portent le nom des quatre phases de la maladie (Rouge, marron, bleu, noir «Ça commence par une légère rougeur qui pourrait faire dire que la personne a bonne mine. Mais quand son état empire, cette rougeur tourne au marron acajou. Une couleur qui me fait toujours penser aux feuilles d'automne. Dans les cas les plus sévères, elle aura ensuite les lèvres bleu lavande. Les joues, les oreilles, et même le bout des doigts peuvent bleuir à mesure que le corps est privé d'air. ») il est remarquable à plusieurs titres. En premier lieu, par le contexte historique qui est parfaitement retranscrit. L'Irlande est sous le joug de la couronne britannique, une insurrection vient d'avoir lieu quelques mois plus tôt (en avril 1916) et la répression est implacable… de même, ces trois journées avec Julia auprès de ces femmes, parfois enceintes de leur douzième enfant à trente trois ans (« onze accouchements, sept enfants en vie »), sont décrites de manière très réaliste. Rien n'est édulcoré, les scènes sont crues, violentes (quelle barbarie de la part de certains médecins –des hommes principalement, il n'y avait que très peu de médecins femmes) l'auteure n'épargne pas son lectorat, que ce soit sur le volet médical ou sur le côté social (emprise de la religion et des religieuses, sort tragique réservé aux orphelins ou aux mères célibataires, destin des femmes qui mettaient au monde un enfant tous les 9 mois «Connaissez-vous ce dicton : « Une femme n'aime pas son mari si elle ne lui donne pas douze enfants »). Très intéressant aussi le parallèle que l'on ne peut s'empêcher de faire avec la crise du COVID qui nous a frappé un siècle plus tard… Une bonne occasion de mesurer les progrès de la médecine, à défaut de celui des mentalités. Enfin, l'intrigue est d'une grande force romanesque, portée par des personnages magnifiques : Julia, la jeune Bridie et le docteur Kathleen Lynn (qui a réellement existé, et dont Emma Donoghue parle dans la postface). L'histoire est forcément tragique mais une lueur d'espoir brille tout de même dans toute cette atmosphère aussi sombre que le Dublin du début du XXème siècle, comme les étoiles sous lesquelles Julia et Bridie passent une nuit enchantée.
J'ai beaucoup aimé ce roman lu en quelques heures (impossible de le lâcher).
Pour en savoir plus sur l'épidémie de « grippe espagnole » : https://www.geo.fr/histoire/la-grippe-espagnole-le-tueur-invisible-de-1918-189192
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